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L' officier objecta les lois de la consigne , et refusa formellement d' obtempérer à l' ordre de ce singulier solliciteur . Bartholoméo fronça le sourcil , jeta sur le commandement un regard terrible , et sembla le rendre responsable des malheurs que ce refus pouvait occasionner ; puis , il garda le silence , se croisa fortement les bras sur la poitrine , et alla se placer sous le portique qui sert de communication entre la cour et le jardin des Tuileries . Les gens qui veulent fortement une chose sont presque toujours bien servis par le hasard .
Au moment où Bartholoméo di Piombo s' asseyait sur une des bornes qui sont auprès de l' entrée des Tuileries , il arriva une voiture d' où descendit Lucien Bonaparte , alors ministre de l' Intérieur .
" Ah ! Loucian , il est bien heureux pour moi de te rencontrer " , s' écria l' étranger .
Ces mots , prononcés en patois corse , arrêtèrent Lucien au moment où il s' élançait sous la voûte , il regarda son compatriote et le reconnut . Au premier mot que Bartholoméo lui dit à l' oreille , il emmena le Corse avec lui .
Murat , Lannes , Rapp se trouvaient dans le cabinet du Premier consul . En voyant entrer Lucien , suivi d' un homme aussi singulier que l' était Piombo , la conversation cessa . Lucien prit Napoléon par la main et le conduisit dans l' embrasure de la croisée .
Après avoir échangé quelques paroles avec son frère , le Premier consul fit un geste de main auquel obéirent Murat et Lannes en s' en allant .
Rapp feignit de n' avoir rien vu , afin de pouvoir rester . Bonaparte l' ayant interpellé vivement , l' aide de camp sortit en rechignant . Le Premier consul , qui entendit le bruit des pas de Rapp dans le salon voisin , sortit brusquement et le vit près du mur qui séparait le cabinet du salon .
" Tu ne veux donc pas me comprendre ? dit le Premier consul . J' ai besoin d' être seul avec mon compatriote .
- Un Corse , répondit l' aide de camp . Je me défie trop de ces gens - là pour ne pas ... "
Le Premier consul ne put s' empêcher de sourire , et poussa légèrement son fidèle officier par les épaules .
" Eh bien , que viens - tu faire ici , mon pauvre Bartholoméo ? dit le Premier consul à Piombo .
- Te demander asile et protection , si tu es un vrai Corse , répondit Bartholoméo d' un ton brusque .
- Quel malheur a pu te chasser du pays ? Tu en étais le plus riche , le plus ...
- J' ai tué tous les Porta " , répliqua le Corse d' un son de voix profond en fronçant les sourcils .
LA VENDETTA (I, privé)
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