----- Revenir à l'écran précédent par la commande BACK -----

- Vous êtes bien difficile , ma chère Mme du Bousquier , toutes les femmes vous envient votre mari . "
Mal jugée par le monde , qui commença par lui donner tort , la chrétienne trouva , dans son intérieur , une ample carrière à déployer ses vertus . Elle vécut dans les larmes et ne cessa d' offrir au monde un visage placide .
Pour une âme pieuse , n' était - ce pas un crime que cette pensée qui lui becqueta toujours le coeur : " J' aimais le chevalier de Valois , et je suis la femme de du Bousquier ! " L' amour d' Athanase se dressait aussi sous la forme d' un remords et la poursuivait dans ses rêves .
La mort de son oncle , dont les chagrins avaient éclaté , lui rendit son avenir encore plus douloureux , car elle pensa toujours aux souffrances que son oncle dut éprouver en voyant le changement des doctrines politiques et religieuses de la maison Cormon .
Souvent le malheur tombe avec la rapidité de la foudre , comme chez Mme Granson ; mais il s' étendit , chez la vieille fille , comme une goutte d' huile qui ne quitte l' étoffe qu' après l' avoir lentement imbibée .
Le chevalier de Valois fut le malicieux artisan de l' infortune de Mme du Bousquier . Il avait à coeur de détromper sa religion surprise ; car le chevalier , si expert en amour , devina du Bousquier marié comme il avait deviné du Bousquier garçon .
Mais le profond républicain était difficile à surprendre : son salon était naturellement fermé au chevalier de Valois , comme à tous ceux qui , dans les premiers jours de son mariage , avaient renié la maison Cormon .
Puis il était supérieur au ridicule , il tenait une immense fortune , il régnait dans Alençon , il se souciait de sa femme comme Richard III se serait soucié de voir crever le cheval à l' aide duquel il aurait gagné la bataille .
Pour plaire à son mari , Mme du Bousquier avait rompu avec la maison d' Esgrignon , où elle n' allait plus ; mais quand son mari la laissait seule pendant ses séjours à Paris , elle faisait alors une visite à Mlle Armande .
Or , deux ans après son mariage , précisément à la mort de l' abbé de Sponde , Mlle Armande aborda Mme du Bousquier au sortir de Saint - Léonard , où elles avaient entendu une messe noire dite pour l' abbé .
La généreuse fille crut qu' en cette circonstance elle devait des consolations à l' héritière en pleurs .

LA VIEILLE FILLE (IV, provinc)
Page: 930