----- Revenir à l'écran précédent par la commande BACK -----

Alençon , qui ne comptait pas en 1816 deux voitures propres , vit en dix ans rouler dans ses rues des calèches , des coupés , des landaus , des cabriolets et des tilburys , sans s' en étonner . Les bourgeois et les propriétaires , effrayés d' abord de voir le prix des choses augmentant , reconnurent plus tard que cette augmentation avait un contrecoup financier dans leurs revenus .
Le mot prophétique du président du Ronceret : " Du Bousquier est un homme très fort ! " fut adopté par le pays . Mais , malheureusement pour sa femme , ce mot est un horrible contresens . Le mari ne ressemble en rien à l' homme public et politique .
Ce grand citoyen , si libéral au - dehors , si bonhomme , animé de tant d' amour pour son pays , est despote au logis et parfaitement dénué d' amour conjugal . Cet homme si profondément astucieux , hypocrite , rusé , ce Cromwell du Val - Noble , se comporte dans son ménage comme il se comportait envers l' aristocratie , qu' il caressait pour l' égorger .
Comme son ami Bernadotte , il chaussa d' un gant de velours sa main de fer .
Sa femme ne lui donna pas d' enfants . Le mot de Suzanne , les insinuations du chevalier de Valois se trouvèrent ainsi justifiés . Mais la bourgeoisie libérale , la bourgeoisie royaliste - constitutionnelle , les hobereaux , la magistrature et le parti - prêtre , comme disait Le Constitutionnel , donnèrent tort à Mme du Bousquier .
M . du Bousquier l' avait épousée si vieille ! disait - on .
D' ailleurs quel bonheur pour cette pauvre femme , car à son âge il était si dangereux d' avoir des enfants ! Si Mme du Bousquier confiait en pleurant ses désespoirs périodiques à Mme du Coudrai , à Mme du Ronceret , ces dames lui disaient : " Mais vous êtes folle , ma chère , vous ne savez pas ce que vous désirez , un enfant serait votre mort ! " Puis , beaucoup d' hommes qui rattachaient , comme M .
du Coudrai , leurs espérances au triomphe de du Bousquier faisaient chanter ses louanges par leurs femmes .
La vieille fille était assassinée par ces phrases cruelles .
" Vous êtes bien heureuse , ma chère , d' avoir épousé un homme capable , vous éviterez les malheurs des femmes qui sont mariées à des gens sans énergie , incapables de conduire leur fortune , de diriger leurs enfants .
- Votre mari vous rend la reine du pays , ma belle . Il ne vous laissera jamais dans l' embarras , celui - là ! Il mène tout dans Alençon .
- Mais je voudrais , disait la pauvre femme , qu' il se donnât moins de peine pour le public , et qu' il ...

LA VIEILLE FILLE (IV, provinc)
Page: 929