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Bientôt , malgré une pluie battante , Mademoiselle sortit du Prébaudet , laissant à ses gens la bride sur le cou . Jacquelin n' osa prendre sur lui de presser le petit trot habituel de la paisible Pénélope , qui , semblable à la belle reine dont elle portait le nom , avait l' air de faire autant de pas en arrière qu' elle en faisait en avant . Voyant cette allure , Mademoiselle ordonna d' une voix aigre à Jacquelin d' avoir à faire galoper , à coups de fouet s' il le fallait , la pauvre jument étonnée ; tant elle avait peur de ne pas avoir le temps d' arranger convenablement la maison pour recevoir M .
de Troisville .
Elle calculait que le petit - fils d' un ami de son oncle pouvait n' avoir que quarante ans ; un militaire devait être immanquablement garçon , elle se promettait donc , son oncle aidant , de ne pas laisser sortir du logis M .
de Troisville dans l' état où il y entrerait . Quoique Pénélope galopât , Mlle Cormon , occupée de ses toilettes et rêvant une première nuit de noces , dit plusieurs fois à Jacquelin qu' il n' avançait pas .
Elle se remuait dans la carriole sans répondre aux demandes de Josette , et se parlait à elle - même comme une personne qui roule de grands desseins . Enfin , la carriole atteignit la grande rue d' Alençon qui s' appelle la rue Saint - Blaise en y entrant du côté de Mortagne , mais vers l' hôtel du More elle prend le nom de la rue de la Porte - de - Séez , et devient la rue du Bercail en débouchant sur la route de Bretagne .
Si le départ de Mlle Cormon faisait grand bruit dans Alençon , chacun peut imaginer le tapage que dut y faire son retour le lendemain de son installation au Prébaudet , et par une pluie battante qui lui fouettait le visage sans qu' elle parût en prendre souci .
Chacun remarqua le galop fou de Pénélope , l' air narquois de Jacquelin , l' heure matinale , les paquets cen dessus dessous , enfin la conversation animée de Josette et de Mlle Cormon , leur impatience surtout .
Les biens de la maison de Troisville se trouvaient situés entre Alençon et Mortagne , Josette connaissait les branches diverses de la famille de Troisville .
Un mot dit par Mademoiselle en atteignant le pavé d' Alençon avait mis Josette au fait de l' aventure ; la discussion s' était établie entre elles , et toutes deux avaient arrêté que le de Troisville attendu devait être un gentilhomme entre quarante et quarante - deux ans , garçon , ni riche ni pauvre .
Mademoiselle se voyait vicomtesse de Troisville .

LA VIEILLE FILLE (IV, provinc)
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