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Il s' est présenté très poliment chez moi , accompagné de ces deux messieurs , et m' a dit que mon père était indubitablement l' auteur des persécutions infâmes exercées sur Ursule Mirouët , sa future ; il m' en a donné les preuves en m' expliquant les aveux de Goupil devant témoins et la conduite de mon père , qui d' abord s' était refusé à exécuter les promesses faites à Goupil pour le récompenser de ses perfides inventions , et qui , après lui avoir fourni les fonds pour traiter de la charge d' huissier à Nemours , avait par peur offert sa garantie à M .
Dionis pour le prix de son étude , et enfin établi Goupil .
Le vicomte , ne pouvant se battre avec un homme de soixante - sept ans , et voulant absolument venger les injures faites à Ursule , me demanda formellement une réparation .
Son parti , pris et médité dans le silence , était inébranlable .
Si je refusais le duel , il avait résolu de me rencontrer dans un salon en face des personnes à l' estime desquelles je tenais le plus , à m' y insulter si gravement que je devrais alors me battre , ou que ma carrière serait finie .
En France , un lâche est unanimement repoussé . D' ailleurs ses motifs pour exiger une réparation seraient expliqués par des hommes honorables .
Il s' est dit fâché d' en venir à de pareilles extrémités . Selon ses témoins le plus sage à moi serait de régler une rencontre comme des gens d' honneur en avaient l' habitude , afin que la querelle n' eût pas Ursule Mirouët pour motif .
Enfin , pour éviter tout scandale en France , nous pouvions faire avec nos témoins un voyage sur la frontière la plus rapprochée . Les choses s' arrangeraient ainsi pour le mieux .
Son nom , a - t - il dit , valait dix fois ma fortune , et son bonheur à venir lui faisait risquer plus que je ne risquais dans ce combat , qui serait mortel . Il m' a engagé à choisir mes témoins et à faire décider ces questions .
Mes témoins choisis se sont réunis aux siens hier , et ils ont à l' unanimité décidé que je devais une réparation . Dans huit jours donc , je partirai pour Genève avec deux de mes amis .
M . de Portenduère , M . de Soulanges et M . de Trailles y vont de leur côté . Nous nous battrons au pistolet ; toutes les conditions du duel sont arrêtées : nous tirerons chacun trois fois , et après , quoi qu' il arrive , tout sera fini .
Pour ne pas ébruiter une si sale affaire , car je suis dans l' impossibilité de justifier la conduite de mon père , je vous écris au dernier moment .
URSULE MIROUET (III, provinc)
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