----- Revenir à l'écran précédent par la commande BACK -----

Les êtres les moins sensibles peuvent deviner ce qu' elle dut éprouver en lisant ces terribles lignes : " Résignez - vous à devenir ma femme , riche et adorée . Je vous veux . Si je ne vous ai vivante , je vous aurai morte . Attribuez à vos refus les malheurs qui n' atteindront pas que vous .
" Celui qui vous aime et à qui vous serez un jour . "
Chose étrange ! au moment où la douce et tendre victime de cette machination était abattue comme une fleur coupée , Mlles Massin , Dionis et Crémière enviaient son sort .
" Elle est bien heureuse , disaient - elles . On s' occupe d' elle , on flatte ses goûts , on se la dispute ! La sérénade était , à ce qu' il paraît , charmante ! Il y avait un cornet à piston !
- Qu' est - ce qu' un piston ?
- Un nouvel instrument de musique ! tiens , grand comme ça " , disait Angéline Crémière à Paméla Massin .
Dès le matin , Savinien était allé jusqu' à Fontainebleau tâcher de savoir qui avait demandé des musiciens du régiment en garnison ; mais comme il y avait deux hommes pour chaque instrument , il fut impossible de connaître ceux qui étaient allés à Nemours .
Le colonel fit défendre aux musiciens de jouer chez des particuliers sans sa permission . Le gentilhomme eut une entrevue avec le procureur du roi , tuteur d' Ursule , et lui expliqua la gravité de ces sortes de scènes sur une jeune fille si délicate et si frêle , en le priant de rechercher l' auteur de cette sérénade par les moyens dont dispose le Parquet .
Trois jours après , au milieu de la nuit , trois violons , une flûte , une guitare et un hautbois donnèrent une seconde sérénade .
Cette fois les musiciens se sauvèrent du côté de Montargis , où se trouvait alors une troupe de comédiens .
Une voix stridente et liquoreuse avait crié entre deux morceaux : " à la fille du capitaine de musique Mirouët ! " Tout Nemours apprit ainsi la profession du père d' Ursule , ce secret si soigneusement gardé par le vieux docteur Minoret .
Savinien n' alla point cette fois à Montargis , il reçut dans la journée une lettre anonyme venue de Paris , où il lut cette horrible prophétie :

URSULE MIROUET (III, provinc)
Page: 945