----- Revenir à l'écran précédent par la commande BACK -----

" Ne reproduisons pas les argumentations précédentes qui reviennent dans toute leur force relativement à la scission de l' Éternité en deux temps , le temps incréé , le temps créé . Laissons également les questions soulevées par la marche ou l' immobilité des mondes , contentons - nous des difficultés inhérentes à ce second thème . Si Dieu préexistait seul , le monde est émané de lui , la Matière fut alors tirée de son essence . Donc , plus de Matière ! toutes les formes sont des voiles sous lesquels se cache l' Esprit Divin .
Mais alors le Monde est éternel , mais alors le Monde est Dieu ! Cette proposition n' est - elle pas encore plus fatale que la précédente aux attributs donnés à Dieu par la raison humaine ? Sortie du sein de Dieu , toujours unie à lui , l' état actuel de la Matière est - il explicable ? Comment croire que le Tout = Puissant , souverainement bon dans son essence et dans ses facultés , ait engendré des choses qui lui sont dissemblables , qu' il ne soit pas en tout et partout semblable à lui - même ? Se trouvait - il donc en lui des parties mauvaises desquelles il se serait un jour débarrassé ? conjecture moins offensante ou ridicule que terrible , en ce qu' elle ramène en lui ces deux principes que la thèse précédente prouve être inadmissibles .
Dieu doit être UN , il ne peut se scinder sans renoncer à la plus importante de ses conditions .
Il est donc impossible d' admettre une fraction de Dieu qui ne soit pas Dieu ? Cette hypothèse parut tellement criminelle à l' Eglise romaine , qu' elle a fait un article de foi de l' omniprésence dans les moindres parcelles de l' Eucharistie .
Comment alors supposer une intelligence omnipotente qui ne triomphe pas ? Comment l' adjoindre , sans un triomphe immédiat , à la Nature ? Et cette Nature cherche , combine , refait , meurt et renaît ; elle s' agite encore plus quand elle crée que quand tout est en fusion ; elle souffre , gémit , ignore , dégénère , fait le mal , se trompe , s' abolit , disparaît , recommence ? Comment justifier la méconnaissance presque générale du principe divin ? Pourquoi la mort ? pourquoi le génie du mal , ce roi de la terre , a - t - il été enfanté par un Dieu souverainement bon dans son essence et dans ses facultés , qui n' a rien dû produire que de conforme à lui - même ? Mais si , de cette conséquence implacable qui nous conduit tout d' abord à l' absurde , nous passons aux détails , quelle fin pouvons - nous assigner au monde ? Si tout est Dieu , tout est réciproquement effet et cause ; ou plutôt il n' existe ni cause ni effet : tout est UN comme Dieu , et vous n' apercevez ni point de départ ni point d' arrivée .
La fin réelle serait - elle une rotation de la matière qui va se subtilisant ?
SERAPHITA (XI, philo)
Page: 812