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Quoique plus âgé de quinze ans que sa femme , cet avare espérait hériter d' elle , et se voir un jour à la tête de tous les biens . Cette espérance était son idée fixe . Aussi Mme Hochon avait - elle bien deviné le moyen d' obtenir de son mari quelques concessions , en le menaçant de faire un testament . M . Hochon prit donc parti pour ses hôtes . Il s' agissait d' ailleurs d' une succession énorme , et , par un esprit de justice sociale , il voulait la voir aller aux héritiers naturels au lieu d' être pillée par des étrangers indignes d' estime .
Enfin , plus tôt cette question serait vidée , plus tôt ses hôtes partiraient .
Depuis que le combat entre les capteurs de la succession et les héritiers , jusqu' alors en projet dans l' esprit de sa femme , se réalisait , l' activité d' esprit de M .
Hochon , endormie par la vie de province , se réveilla . Mme Hochon fut assez agréablement surprise quand , le matin même , elle s' aperçut , à quelques mots d' affection dits par le vieil Hochon sur sa filleule , que cet auxiliaire si compétent et si subtil était acquis aux Bridau .
Vers midi , les intelligences réunies de M . et Mme Hochon , d' Agathe et de Joseph , assez étonnés de voir les deux vieillards si scrupuleux dans le choix de leurs mots , avaient accouché de la réponse suivante , faite uniquement pour Flore et Maxence .
" Mon cher frère ,
" Si je suis restée trente ans sans revenir ici , sans y entretenir de relations avec qui que ce soit , pas même avec vous , la faute en est , non seulement aux étranges et fausses idées que mon père avait conçues contre moi , mais encore aux malheurs , et aussi au bonheur de ma vie à Paris ; car si Dieu fit la femme heureuse , il a bien frappé la mère .
Vous n' ignorez point que mon fils , votre neveu Philippe , est sous le coup d' une accusation capitale , à cause de son dévouement à l' Empereur .
Ainsi , vous ne serez pas étonné d' apprendre qu' une veuve obligée , pour vivre , d' accepter un modique emploi dans un bureau de loterie , soit venue chercher des consolations et des secours auprès de ceux qui l' ont vue naître .
L' état embrassé par celui de mes fils qui m' accompagne est un de ceux qui veulent le plus de talent , le plus de sacrifices , le plus d' études avant d' offrir des résultats .
La gloire y précède la fortune . N' est - ce pas vous dire que quand Joseph illustrera notre famille , il sera pauvre encore .

LA RABOUILLEUSE (IV, provinc)
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