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Cette conversation , tenue au moment où , après avoir changé de voiture à Orléans , Mme Bridau et Joseph entraient en Sologne , indique assez l' incapacité du peintre et de sa mère à jouer le rôle auquel le terrible maître Desroches les destinait . Mais en revenant à Issoudun après trente ans d' absence , Agathe allait y trouver de tels changements dans les moeurs qu' il est nécessaire de tracer en peu de mots un tableau de cette ville .
Sans cette peinture , on comprendrait difficilement l' héroïsme que déployait Mme Hochon en secourant sa filleule , et l' étrange situation de Jean - Jacques Rouget . Quoique le docteur eût fait considérer Agathe comme une étrangère à son fils , il y avait , pour un frère , quelque chose d' un peu trop extraordinaire à rester trente ans sans donner signe de vie à sa soeur .
Ce silence reposait évidemment sur des circonstances bizarres que des parents , autres que Joseph et Agathe , auraient depuis longtemps voulu connaître .
Enfin il existait entre l' état de la ville et les intérêts des Bridau certains rapports qui se reconnaîtront dans le cours même du récit .
N' en déplaise à Paris , Issoudun est une des plus vieilles villes de France . Malgré les préjugés historiques qui font de l' Empereur Probus le Noé des Gaules , César a parlé de l' excellent vin de Champ - Fort ( de Campo Forti ) , un des meilleurs clos d' Issoudun .
Rigord s' exprime sur le compte de cette ville en termes qui ne laissent aucun doute sur sa grande population et sur son immense commerce . Mais ces deux témoignages assigneraient un âge assez médiocre à cette ville en comparaison de sa haute antiquité .
En effet , des fouilles récemment opérées par un savant archéologue de cette ville , M . Armand Pérémé , ont fait découvrir sous la célèbre tour d' Issoudun une basilique du cinquième siècle , la seule probablement qui existe en France .
Cette église garde , dans ses matériaux mêmes , la signature d' une civilisation antérieure , car ses pierres proviennent d' un temple romain qu' elle a remplacé .
Ainsi , d' après les recherches de cet antiquaire , Issoudun , comme toutes les villes de France dont la terminaison ancienne ou moderne comporte le DUN ( dunum ) , offrirait dans son nom le certificat d' une existence autochtone .
Ce mot Dun , l' apanage de toute éminence consacrée par le culte druidique , annoncerait un établissement militaire et religieux des Celtes .
Les Romains auraient bâti sous le Dun des Gaulois un temple à Isis . De là , selon Chaumeau , le nom de la ville : Is - sous - Dun ! Is serait l' abréviation d' Isis .

LA RABOUILLEUSE (IV, provinc)
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