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Je sens que je ne balancerai jamais dans votre coeur l' intérêt qu' inspirent une femme vertueuse , des enfants , une famille ... Un jour je serais abandonnée à toute la sévérité de vos réflexions . Vous diriez de moi froidement : " J' ai eu cette femme - là ! ... " Phrase que j' entends prononcer par les hommes avec la plus insultante indifférence . Vous voyez , monsieur , que je raisonne froidement , et que je ne vous aime pas , parce que vous - même vous ne sauriez m' aimer ...
- Hé ! que faut - il donc pour vous convaincre de mon amour ? ... " s' écria le baron en contemplant la jeune femme . Jamais elle ne lui avait paru si ravissante qu' en ce moment , où sa voix lutine lui prodiguait des paroles dont la dureté semblait démentie par la grâce de ses gestes , par ses airs de tête et par son attitude coquette .
" Oh ! quand je verrai Louise avoir un amant , reprit - elle , quand je saurai que je ne lui ai rien enlevé , et qu' elle n' aura rien à regretter en perdant votre affection ; quand je serai bien sûre que vous ne l' aimez plus , en acquérant une preuve certaine de votre indifférence pour elle ... oh , alors , je pourrai vous écouter ! - Ces paroles doivent vous paraître odieuses , reprit - elle d' un son de voix profond ; elles le sont en effet , mais ne croyez pas qu' elles soient prononcées par moi .
Je suis le mathématicien rigoureux qui tire toutes les conséquences d' une première proposition .
Vous êtes marié , et vous vous avisez d' aimer ? ... Je serais folle de donner quelque espérance à un homme qui ne peut pas être éternellement à moi .
- Démon ! ... s' écria le mari . Oui , vous êtes un démon et non pas une femme ! ...
- Mais vous êtes vraiment plaisant ! ... dit la jeune dame en saisissant le cordon de sa sonnette .
- Oh ! non , Émilie ! ... reprit d' une voix plus calme l' amant quadragénaire . Ne sonnez pas , arrêtez , pardonnez - moi ? ... Je vous sacrifierai tout ! ...
- Mais je ne vous promets rien ! ... dit - elle vivement et en riant .
- Dieu ! que vous me faites souffrir ! ... s' écria - t - il .
- Eh ! n' avez - vous pas dans votre vie causé plus d' un malheur ? demanda - t - elle . Souvenez - vous de toutes les larmes qui , par vous et pour vous , ont coulé ! ... Oh ! votre passion ne m' inspire pas la moindre pitié . Si vous voulez que je n' en rie pas , faites - la - moi partager ...
- Adieu , madame . Il y a de la clémence dans vos rigueurs . J' apprécie la leçon que vous me donnez . Oui , j' ai des erreurs à expier ...

MARIAGE PHYSIOLOGIE (XI, analyt)
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