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leurs pâles corolles , ce n' est plus les marguerites qui percent les pelouses de leurs yeux blancs , mais de rares calices violâtres , le jaune abonde , les ombrages sont plus foncés , le soleil plus oblique déjà y glisse des lueurs orangées et furtives , de longues traces lumineuses qui s' en vont vite comme les robes traînantes des femmes qui disent adieu .
Le second jour après son arrivée , un matin , Émile était à la fenêtre de sa chambre qui donnait sur une de ces terrasses à balcons modernes d' où l' on découvrait une belle vue .
Ce balcon régnait le long des appartements de la comtesse , sur la face qui regardait les forêts et le paysage de Blangy .
L' étang , qu' on eût nommé un lac si les Aigues avaient été plus près de Paris , se voyait un peu , ainsi que son long canal , la source venue du pavillon du Rendez - vous traversait une pelouse de son ruban moiré et pailleté par le sable .
Au - dehors du parc , on apercevait , contre les villages et les murs , les cultures de Blangy , quelques prairies en pente où paissaient des vaches , des propriétés entourées de haies , avec leurs arbres fruitiers , des noyers , des pommiers , puis comme cadre les hauteurs , où s' étalaient par étages les beaux arbres de la forêt .
La comtesse était sortie en pantoufles , elle regardait ses fleurs qui versaient leurs parfums du matin , elle avait un peignoir de batiste sous lequel paraissait le rose de ses belles épaules , elle avait un joli bonnet coquet posé d' une façon à exprimer la mutinerie , ses cheveux s' en échappaient follement , ses pieds brillaient en couleur de chair sous son bas clair .
Elle allait sans ceinture , et laissait voir un joli jupon de dessous brodé , mal attaché sur son corps à la paresseuse , qui se voyait aussi , quand le vent entrouvrait le peignoir ...
" Ah ! vous êtes là ! dit - elle .
- Oui ...
- Que regardez - vous ?
- Belle question ! vous m' avez arraché à la nature . Dites donc , comtesse , voulez - vous faire ce matin , avant de déjeuner , une promenade dans les bois ...
- Quelle idée ! j' ai la marche en horreur .
- Nous ne marcherons que très peu , je vous conduirai en tilbury , nous emmènerons Joseph pour le garder ... Vous n' avez jamais mis le pied dans votre forêt , et j' y
LES PAYSANS (IX, campagn)
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