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visiteurs qu' on ne logeait pas au château ; mais , depuis vingt - cinq ans , ces chambres garnies n' avaient plus pour locataires que des saltimbanques , des marchands forains , des vendeurs de remèdes ou d' images , des comédiens ambulants ou des commis voyageurs .
Au moment de la fête de Soulanges , ces chambres se louaient à raison de quatre francs par jour .
Les quatre chambres de Socquard lui rapportaient une centaine d' écus , sans compter le produit de la consommation extraordinaire que ses locataires faisaient alors dans son café .
La façade du côté de la place était ornée de peintures spéciales . Dans le tableau qui séparait chaque croisée de la porte , se voyaient des queues de billard amoureusement nouées par des rubans , et au - dessus des noeuds s' élevaient des bols de punch fumant dans des coupes grecques .
Ces mots Café de la Paix brillaient peints en jaune sur un champ vert à chaque extrémité duquel étaient des pyramides de billes tricolores . Les fenêtres peintes en vert avaient des petites vitres de verre commun .
Dix thuyas plantés à droite et à gauche dans des caisses , et qu' on devrait nommer des arbres à cafés , offraient leur végétation aussi maladive que prétentieuse . Les bannes par lesquelles les marchands de Paris et de quelques cités opulentes protègent leurs boutiques contre les ardeurs du soleil , sont un luxe inconnu dans Soulanges . Les fioles exposées sur des planches derrière les vitrages méritaient d' autant plus leur nom , que la benoîte liqueur subissait là des cuissons périodiques . En concentrant ses rayons par les bosses lenticulaires des vitres , le soleil faisait bouillonner les bouteilles de Madère , les sirops , les vins de liqueur , les bocaux de prunes et de cerises à l' eau - de - vie mis en étalage , car la chaleur était si grande qu' elle forçait Aglaé , son père et leur garçon à se tenir sur deux banquettes placées de chaque côté de la porte et mal abritées par les pauvres arbustes que Mademoiselle arrosait avec de l' eau presque chaude . Par certains jours , on les voyait tous trois étalés là comme des animaux domestiques et dormant .
En 1804 , époque de la vogue de Paul et Virginie , l' intérieur fut tendu d' un papier verni représentant les principales scènes de ce roman . On y voyait des nègres récoltant le café , qui se trouvait au moins quelque part dans cet établissement , où l' on ne buvait pas trente
LES PAYSANS (IX, campagn)
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