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a rougi , la rouille y a mêlé ses teintes ; mais cette porte , dite de l' Avenue , et qui révèle la main du Grand Dauphin à qui les Aigues la doivent , ne m' en a paru que plus belle .
Au bout de chaque saut - de - loup commencent des murailles non crépies où les pierres , enchâssées dans un mortier de terre rougeâtre , montrent leurs teintes multipliées : le jaune ardent du silex , le blanc de la craie , le brun - rouge de la meulière et les formes les plus capricieuses .
Au premier abord , le parc est sombre , ses murs sont cachés par des plantes grimpantes , par des arbres qui , depuis cinquante ans , n' ont pas entendu la hache .
On dirait d' une forêt redevenue vierge par un phénomène exclusivement réservé aux forêts .
Les troncs sont enveloppés de lianes qui vont de l' un à l' autre .
Des guis d' un vert luisant pendent à toutes les bifurcations des branches où il a pu séjourner de l' humidité .
J' ai retrouvé les lierres gigantesques , les arabesques sauvages qui ne fleurissent qu' à cinquante lieues de Paris , là où le terrain ne coûte pas assez cher pour qu' on l' épargne .
L' art ainsi compris , veut beaucoup de terrain .
Là , donc , rien de peigné , le râteau ne se sent pas , l' ornière est pleine d' eau , la grenouille y fait tranquillement ses têtards , les fines fleurs de forêt y poussent , et la bruyère y est aussi belle qu' en janvier sur ta cheminée , dans le riche cache - pot apporté par Florine .
Ce mystère enivre , il inspire de vagues désirs .
Les odeurs forestières , senteurs adorées par les âmes friandes de poésie à qui plaisent les mousses les plus innocentes , les cryptogames les plus vénéneux , les terres mouillées , les saules , les baumes , le serpolet , les eaux vertes d' une mare , l' étoile arrondie des nénuphars jaunes ; toutes ces vigoureuses fécondations se livrent à vos narines en vous livrant toutes une pensée , leur âme peut - être .
Je pensais alors à une robe rose ondoyant a travers cette allée tournante .
" L' allée finit brusquement par un dernier bouquet où tremblent les bouleaux , les peupliers et tous les arbres frémissants , famille intelligente , à tiges gracieuses , d' un port élégant , les arbres de l' amour libre ! De là , j' ai vu mon cher , un étang couvert de nymphéas , de plantes aux larges feuilles étalées ou aux petites feuilles menues , et sur lequel pourrit un bateau peint en blanc et noir , coquet comme la chaloupe d' un canotier de la Seine , léger comme une coquille de
LES PAYSANS (IX, campagn)
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