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Je sais tout et je ne sais rien . Et puis , ma passion est connue . J' aime Modeste , elle est mon élève , elle doit faire un beau mariage ... Et j' emboiserais le duc , s' il le fallait . Mais vous épousez ...
Germain , le café , les liqueurs ... dit Canalis .
Des liqueurs ? ... répéta Butscha levant la main comme une fausse vierge qui veut résister à une petite séduction . Ah ! mes pauvres actes ! ... il y a justement un contrat de mariage . Tenez , mon second clerc est bête comme un avantage matrimonial et capable de f ... f ... flanquer un coup de canif dans les paraphernaux de la future épouse , il se croit bel homme parce qu' il a cinq pieds six pouces ... un imbéclle .
Tenez , voici de la crème de thé , une liqueur des îles , dit Canalis . Vous que Mlle Modeste consulte ...
Elle me consulte ...
Eh bien , croyez - vous qu' elle m' aime ? demanda le poète .
Ui , plus qu' elle n' aime le duc ! répondit le nain en sortant d' une espèce de torpeur qu' il jouait à merveille . Elle vous aime à cause de votre désintéressement . Elle me disait que pour vous elle était capable des plus grands sacrifices , de se passer de toilette , de ne dépenser que mille écus par an , d' employer sa vie à vous prouver qu' en l' épousant vous auriez fait une excellente affaire , et elle est crânement ( un hoquet ) honnête , allez ! et instruite , elle n' ignore de rien , cette fille - là !
ça et trois cent mille francs , dit Canalis .
Oh ! il y a peut - être ce que vous dites , reprit avec enthousiasme le clerc . Le papa Mignon ... Voyez - vous , il est mignon comme père ( aussi l' estimé - je ... ) . Pour bien établir sa fille unique , il se dépouillera de tout ... Ce colonel est habitué par votre Restauration ( un hoquet ) à rester en demi - solde , il sera très heureux de vivre avec Dumay en carottant au Havre , il donnera certainement ses trois cent mille francs à la petite ... Mais n' oublions pas Dumay , qui destine sa fortune à Modeste .
Dumay , vous savez , est breton , son origine est une valeur au contrat , il ne variera pas , et sa fortune vaudra celle de son patron .
Néanmoins , comme ils m' écoutent , au moins autant que vous , quoique je ne parle pas tant ni si bien , je leur ai dit : " Vous mettez trop à votre habitation ; si Vilquin vous la laisse , voilà deux cent mille francs qui ne rapporteront rien ... Il resterait donc cent mille francs à faire boulotter ... ce n' est pas assez , à mon avis ... " En ce moment , le colonel et Dumay se consultent .
Croyez - moi !
MODESTE MIGNON (I, privé)
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