----- Revenir à l'écran précédent par la commande BACK -----

Benassis et l' église , près de cinq mille personnes qui , pour la plupart , se sont agenouillées comme à la procession . L' église ne pouvait pas contenir tout le monde . Quand l' office a commencé , il s' est fait , malgré les pleurs , un si grand silence , que l' on entendait la clochette et les chants au bout de la grande rue .
Mais lorsqu' il a fallu transporter le corps au nouveau cimetière que M . Benassis avait donné au bourg , ne se doutant guère , le pauvre homme , qu' il y serait enterré le premier , il s' est alors élevé un grand cri .
M . Janvier disait les prières en pleurant , et tous ceux qui étaient là avaient des larmes dans les yeux . Enfin il a été enterré . Le soir , la foule était dissipée , et chacun s' en est allé chez soi , semant le deuil et les pleurs dans le pays .
Le lendemain matin , Gondrin , Goguelat , Butifer , le garde champêtre et plusieurs personnes se sont mis à travailler pour élever sur la place où gît M .
Benassis une espèce de pyramide en terre , haute de vingt pieds , que l' on gazonne , et à laquelle tout le monde s' emploie . Tels sont , mon bon père , les événements qui se sont passés ici depuis trois jours .
Le testament de M . Benassis a été trouvé tout ouvert dans sa table , par M . Dufau . L' emploi que notre bon ami fait de ses biens a encore augmenté , s' il est possible , l' attachement qu' on avait pour lui , et les regrets causés par sa mort .
Maintenant , mon cher père , j' attends par Butifer , qui vous porte cette lettre , une réponse pour que vous me disiez ma conduite . Viendrez - vous me chercher , ou dois - je aller vous rejoindre à Grenoble ? Dites - moi ce que vous souhaitez que je fasse , et soyez sûr de ma parfaite obéissance .
" Adieu , mon père , je vous envoie les mille tendresses de votre fils affectionné .
" ADRIEN GENESTAS . "
" Allons , il faut y aller " , s' écria le soldat .
Il commanda de seller son cheval , et se mit en route par une de ces matinées de décembre où le ciel est couvert d' un voile grisâtre , où le vent n' est pas assez fort pour chasser le brouillard à travers lequel les arbres décharnés et les maisons humides n' ont plus leur physionomie habituelle .
Le silence était terne , car il est d' éclatants silences . Par un beau temps , le moindre bruit a de la gaieté ; mais par un temps sombre la nature n' est pas silencieuse , elle est muette .

MEDECIN DE CAMPAGNE (IX, campagn)
Page: 598