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Ainsi donc , en multipliant les froissements , vous étendez le combat sur tous les points du corps social au lieu de le contenir dans un cercle étroit . Quand l' attaque et la résistance sont générales , la ruine d' un pays est imminente .
Il y aura toujours moins de riches que de pauvres ; donc à ceux - ci la victoire aussitôt que la lutte devient matérielle . L' histoire se charge d' appuyer mon principe . La république romaine a dû la conquête du monde à la constitution du privilège sénatorial .
Le Sénat maintenait fixe la pensée du pouvoir . Mais lorsque les chevaliers et les hommes nouveaux eurent étendu l' action du gouvernement en élargissant le patriciat , la chose publique a été perdue .
Malgré Sylla , et après César , Tibère en a fait l' empire romain , système où le pouvoir , s' étant concentré dans la main d' un seul homme , a donné quelques siècles de plus à cette grande domination .
L' Empereur n' était plus à Rome , quand la Ville éternelle tomba sous les Barbares . Lorsque notre sol fut conquis , les Francs , qui se le partagèrent , inventèrent le privilège féodal pour se garantir leurs possessions particulières .
Les cent ou les mille chefs qui possédèrent le pays établirent leurs institutions dans le but de défendre les droits acquis par la conquête .
Aussi , la féodalité dura - t - elle tant que le privilège fut restreint . Mais quand les hommes de cette nation , véritable traduction du mot gentilshommes , au lieu d' être cinq cents furent cinquante mille , il y eut révolution .
Trop étendue , l' action de leur pouvoir était sans ressort ni force , et se trouvait d' ailleurs sans défense contre les manumissions de l' argent et de la pensée qu' ils n' avaient pas prévues .
Donc , le triomphe de la bourgeoisie sur le système monarchique ayant pour objet d' augmenter aux yeux du peuple le nombre des privilégiés , le triomphe du peuple sur la bourgeoisie serait l' effet inévitable de ce changement .
Si cette perturbation arrive , elle aura pour moyen le droit de suffrage étendu sans mesure aux masses . Qui vote , discute . Les pouvoirs discutés n' existent pas .
Imaginez - vous une société sans pouvoir ? Non . Eh bien , qui dit pouvoir dit force . La force doit reposer sur des choses jugées . Telles sont les raisons qui m' ont conduit à penser que le principe de l' élection est un des plus funestes à l' existence des gouvernements modernes .

MEDECIN DE CAMPAGNE (IX, campagn)
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