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Le Christ ne s' apercevant pas de sa mort , ayant assez perfectionné l' être intérieur par des oeuvres divines pour qu' un jour la forme invisible en apparût à ses disciples , enfin les mystères de l' Évangile , les guérisons magnétiques du Christ et le don des langues lui confirmaient sa doctrine .
Je me souviens de lui avoir entendu dire à ce sujet que le plus bel ouvrage à faire aujourd' hui était l' Histoire de l' Église primitive .
Jamais il ne s' élevait autant vers la poésie qu' au moment où il abordait , dans une conversation du soir , l' examen des miracles opérés par la puissance de la Volonté pendant cette grande époque de foi .
Il trouvait les plus fortes preuves de sa Théorie dans presque tous les martyres subis pendant le premier siècle de l' Église , qu' il appelait la grande ère de la pensée . " Les phénomènes arrivés dans la plupart des supplices si héroïquement soufferts par les chrétiens pour l' établissement de leurs croyances ne prouvent - ils pas , disait - il , que les forces matérielles ne prévaudront jamais contre la force des idées ou contre la Volonté de l' homme ? Chacun peut conclure de cet effet produit par la volonté de tous , en faveur de la sienne .
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Je ne crois pas devoir parler de ses idées sur la poésie et sur l' histoire , ni de ses jugements sur les chefs - d' oeuvre de notre langue . Il n' y aurait rien de bien curieux à consigner ici des opinions devenues presque vulgaires aujourd' hui , mais qui , dans la bouche d' un enfant , pouvaient alors paraître extraordinaires .
Louis était à la hauteur de tout . Pour exprimer en deux mots son talent , il eût écrit Zadig aussi spirituellement que l' écrivit Voltaire ; il aurait aussi fortement que Montesquieu pensé le Dialogue de Sylla et d' Eucrate .
La grande rectitude de ses idées lui faisait désirer avant tout , dans une oeuvre , un caractère d' utilité ; de même que son esprit fin y exigeait la nouveauté de la pensée autant que celle de la forme .
Tout ce qui ne remplissait pas ces conditions lui causait un profond dégoût .
L' une de ses appréciations littéraires les plus remarquables , et qui fera comprendre le sens de toutes les autres aussi bien que la lucidité de ses jugements , est celle - ci , qui m' est restée dans la mémoire : " L' Apocalypse est une extase écrite .

LOUIS LAMBERT (XI, philo)
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