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Toi seule , ici , tu dois pleurer ma mort . Ma mort , reprit - elle après une longue pause pendant laquelle je ne l' ai vue qu' à travers le voile de mes larmes , porte avec elle un cruel enseignement . Mon cher docteur en corset a raison : le mariage ne saurait avoir pour base la passion , ni même l' amour .
Ta vie est une belle et noble vie , tu as marché dans ta voie , aimant toujours de plus en plus ton Louis ; tandis qu' en commençant la vie conjugale par une ardeur extrême , elle ne peut que décroître .
J' ai eu deux fois tort , et deux fois la Mort sera venue souffleter mon bonheur de sa main décharnée . Elle m' a enlevé le plus noble et le plus dévoué des hommes ; aujourd' hui , la camarde m' enlève au plus beau , au plus charmant , au plus poétique époux du monde .
Mais j' aurai tour à tour connu le beau idéal de l' âme et celui de la forme . Chez Felipe , l' âme domptait le corps et le transformait ; chez Gaston , le coeur , l' esprit et la beauté rivalisent .
Je meurs adorée , que puis - je vouloir de plus ? ... me réconcilier avec Dieu que j' ai négligé peut - être , et vers qui je m' élancerai pleine d' amour en lui demandant de me rendre un jour ces deux anges dans le ciel .
Sans eux , le paradis serait désert pour moi . Mon exemple serait fatal : je suis une exception . Comme il est impossible de rencontrer des Felipe ou des Gaston , la loi sociale est en ceci d' accord avec la loi naturelle .
Oui , la femme est un être faible qui doit , en se mariant , faire un entier sacrifice de sa volonté à l' homme , qui lui doit en retour le sacrifice de son égoïsme .
Les révoltes et les pleurs que notre sexe a élevés et jetés dans ces derniers temps avec tant d' éclat sont des niaiseries qui nous méritent le nom d' enfants que tant de philosophes nous ont donné .
"
Elle a continué de parler ainsi de sa voix douce que tu connais , en disant les choses les plus sensées de la manière la plus élégante , jusqu' à ce que Gaston entrât , amenant de Paris sa belle - soeur , les deux enfants et la bonne anglaise que Louise l' avait prié d' aller chercher .
" Voilà mes jolis bourreaux , a - t - elle dit en voyant ses deux neveux . Ne pouvais - je pas m' y tromper ? Comme ils ressemblent à leur oncle ! " Elle a été charmante pour Mme Gaston l' aînée , qu' elle a priée de se regarder au Chalet comme chez elle , et elle lui en a fait les honneurs avec ces façons à la Chaulieu qu' elle possède au plus haut degré .
DEUX JEUNES MARIEES (I, privé)
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