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Nous avions chanté tes louanges sur tous les tons , car il a bien vu que je t' aimais comme une soeur que l' on aime ; et après l' avoir amené , sans qu' il y prit garde , à des confidences : " Louise , lui ai - je dit , n' a pas encore lutté avec la vie , elle est traitée en enfant gâté par le sort , et peut - être serait - elle malheureuse si vous ne saviez pas être un père pour elle comme vous êtes un amant .
Et le puis - je ? " a - t - il dit ! Il s' est arrêté tout court , comme un homme qui voit le précipice où il va rouler . Cette exclamation m' a suffi .
Si tu n étais pas partie , il m' en aurait dit davantage quelques jours après .
Mon ange , quand cet homme sera sans forces , quand il aura trouvé la satiété dans le plaisir , quand il se sentira , je ne dis pas avili , mais sans sa dignité devant toi , les reproches que lui fera sa conscience lui donneront une sorte de remords , blessant pour toi par cela même que tu te sentiras coupable .
Enfin tu finiras par mépriser celui que tu ne te seras pas habituée à respecter . Songes - y . Le mépris chez la femme est la première forme que prend sa haine .
Comme tu es noble de coeur , tu te souviendras toujours des sacrifices que Felipe t' aura faits ; mais il n' aura plus à t' en faire après s' être en quelque sorte servi lui - même dans ce premier festin , et malheur à l' homme comme à la femme qui ne laissent rien à souhaiter ! Tout est dit .
à notre honte ou à notre gloire , je ne saurais décider ce point délicat , nous ne sommes exigeantes que pour l' homme qui nous aime !
O Louise , change , il en est temps encore . Tu peux , en te conduisant avec Macumer comme je me conduis avec l' Estorade , faire surgir le lion caché dans cet homme vraiment supérieur . On dirait que tu veux te venger de sa supériorité .
Ne seras - tu donc pas fière d' exercer ton pouvoir autrement qu' à ton profit , de faire un homme de génie d' un homme grand , comme je fais un homme supérieur d' un homme ordinaire ?
Tu serais restée à la campagne , je t' aurais toujours écrit cette lettre ; j' eusse craint ta pétulance et ton esprit dans une conversation , tandis que je sais que tu réfléchiras à ton avenir en me lisant .
Chère âme , tu as tout pour être heureuse , ne gâte pas ton bonheur , et retourne dès le mois de novembre à Paris . Les soins et l' entraînement du monde dont je me plaignais sont des diversions nécessaires à votre existence , peut - être un peu trop intime .

DEUX JEUNES MARIEES (I, privé)
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