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Nous avons eu , Felipe et moi , notre première querelle à ce sujet . Je voulais qu' il eût la force de me tuer à trente ans , pendant mon sommeil , sans que je m' en doutasse , pour me faire entrer d' un rêve dans un autre . Le monstre n' a pas voulu . Je l' ai menacé de le laisser seul dans la vie , et il a pâli , le pauvre enfant ! Ce grand ministre est devenu , ma chère , un vrai bambin .
C' est incroyable tout ce qu' il cachait de jeunesse et de simplicité . Maintenant que je pense tout haut avec lui comme avec toi , que je l' ai mis à ce régime de confiance , nous nous émerveillons l' un de l' autre .
Ma chère , les deux amants , Felipe et Louise , veulent envoyer un présent à l' accouchée . Nous voudrions faire faire quelque chose qui te plût . Ainsi dis - moi franchement ce que tu désires , car nous ne donnons pas dans les surprises , à la façon des bourgeois .
Nous voulons donc nous rappeler sans cesse à toi par un aimable souvenir , par une chose qui te serve tous les jours , et ne périsse point par l' usage .
Notre repas le plus gai , le plus intime , le plus animé , car nous y sommes seuls , est pour nous le déjeuner ; j' ai donc pensé à t' envoyer un service spécial , appelé déjeuner , dont les ornements seraient des enfants .
Si tu m' approuves , réponds - moi promptement . Pour te l' apporter , il faut le commander , et les artistes de Paris sont comme des rois fainéants . Ce sera mon offrande à Lucine .
Adieu , chère nourrice , je te souhaite tous les plaisirs des mères , et j' attends avec impatience la première lettre où tu me diras bien tout , n' est - ce pas ? Cet accoucheur me fait frissonner . Ce mot de la lettre de ton mari m' a sauté non pas aux yeux , mais au coeur .
Pauvre Renée , un enfant coûte cher , n' est - ce pas ? Je lui dirai combien il doit t' aimer , ce filleul . Mille tendresses , mon ange .
XXXI
RENÉE DE L' ESTORADE
à LOUISE DE MACUMER

DEUX JEUNES MARIEES (I, privé)
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