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- Madame , dit Popinot , quand M . d' Espard vous quitta , ne vous donna - t - il pas une procuration pour gérer et administrer vos biens ?
- Je ne comprends pas le but de ces questions , dit vivement la marquise . Il me semble que si vous preniez en considération l' état où me met la démence de mon mari , vous devriez vous occuper de lui et non de moi .
- Madame , dit le juge , nous y arrivons . Avant de confier à vous ou à d' autres l' administration des biens de M . d' Espard , s' il était interdit , le tribunal doit savoir comment vous avez gouverné les vôtres .
Si M . d' Espard vous avait remis une procuration , il vous aurait témoigné de la confiance , et le tribunal apprécierait ce fait . Avez - vous eu sa procuration ? Vous pourriez avoir acheté , vendu des immeubles , placé des fonds ?
- Non , monsieur ; il n' est pas dans les habitudes des Blamont - Chauvry de faire le commerce , dit - elle , vivement piquée dans son orgueil nobiliaire et oubliant son affaire . Mes biens sont restés intacts , et M . d' Espard ne m' a pas donné de procuration . "
Le chevalier mit la main sur ses yeux pour ne pas laisser voir la vive contrariété que lui faisait éprouver le peu de prévoyance de sa belle - soeur , qui se tuait par ses réponses . Popinot avait marché droit au fait malgré les détours de son interrogatoire .
" Madame , dit le juge en montrant le chevalier , monsieur , sans doute , vous appartient par les liens du sang ? nous pouvons parler à coeur ouvert devant ces messieurs ,
- Parlez , dit la marquise étonnée de cette précaution .
- Eh bien , madame , j' admets que vous ne dépensiez que soixante mille francs par an , et cette somme semblera bien employée à qui voit vos écuries , votre hôtel , votre nombreux domestique , et les habitudes d' une maison dont le luxe me semble supérieur à celui des Jeanrenaud . "
La marquise fit un geste d' assentiment .
" Or , reprit le juge , si vous ne possédez que vingt - six mille francs de rente , entre nous soit dit , vous pourriez avoir une centaine de mille francs de dettes . Le tribunal serait donc en droit de croire qu' il existe dans les motifs qui vous portent à demander l' interdiction de monsieur votre mari un intérêt personnel , un besoin d' acquitter vos dettes si ... vous ... en ... aviez .

INTERDICTION (III, privé)
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