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" Pourquoi donc ne vois - je pas venir M . Derville ? demanda - t - il à son valet de chambre qu' il croyait lui être très attaché , mais qui était tout à fait dans les intérêts de la comtesse . Comment , Maurice , s' écria le moribond qui se mit sur son séant et parut avoir recouvré toute sa présence d' esprit , voici sept ou huit fois que je vous envoie chez mon avoué , depuis quinze jours , et il n' est pas venu ? Croyez - vous que l' on puisse se jouer de moi ? Allez le chercher sur - le - champ , à l' instant , et ramenez - le .
Si vous n' exécutez pas mes ordres , je me lèverai moi - même et j' irai ... " " Madame , dit le valet de chambre en sortant , vous avez entendu M .
le comte , que dois - je faire ? - Vous feindrez d' aller chez l' avoué , et vous reviendrez dire à monsieur que son homme d' affaires est allé à quarante lieues d' ici pour un procès important .
Vous ajouterez qu' on l' attend à la fin de la semaine . " " Les malades s' abusent toujours sur leur sort , pensa la comtesse , et il attendra le retour de cet homme .
" Le médecin avait déclaré la veille qu' il était difficile que le comte passât la journée . Quand , deux heures après , le valet de chambre vint faire à son maître cette réponse désespérante , le moribond parut très agité .
" Mon Dieu ! mon Dieu ! répéta - t - il à plusieurs reprises , je n' ai confiance qu' en vous . " Il regarda son fils pendant longtemps , et lui dit enfin d' une voix affaiblie : " Ernest , mon enfant , tu es bien jeune ; mais tu as bon coeur et tu comprends sans doute la sainteté d' une promesse faite à un mourant , à un père .
Te sens - tu capable de garder un secret , de l' ensevelir en toi - même de manière à ce que ta mère elle - même ne s' en doute pas ? Aujourd' hui , mon fils , il ne reste que toi dans cette maison à qui je puisse me fier .
Tu ne trahiras pas ma confiance ? - Non , mon père .
- Eh bien , Ernest , je te remettrai , dans quelques moments , un paquet cacheté qui appartient à M . Derville , tu le conserveras de manière à ce que personne ne sache que tu le possèdes , tu t' échapperas de l' hôtel et tu le jetteras à la petite poste qui est au bout de la rue .
- Oui , mon père . - Je puis compter sur toi ? - Oui , mon père . - Viens m' embrasser . Tu me rends ainsi la mort moins amère , mon cher enfant .
Dans six ou sept années , tu comprendras l' importance de ce secret , et alors , tu seras bien récompensé de ton adresse et de ta fidélité , alors tu sauras combien je t' aime . Laisse - moi seul un moment et empêche qui que ce soit d' entrer ici .

GOBSECK (II, privé)
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