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Espérons une troisième rencontre plus complètement heureuse ... - Victor , je voudrais voir mon père encore un moment , dit Hélène d' un ton boudeur .
- Dix minutes de plus ou de moins peuvent nous mettre face à face avec une frégate . Soit ! Nous nous amuserons un peu . Nos gens s' ennuient .
- Oh ! partez , mon père , s' écria la femme du marin . Et portez à ma soeur , à mes frères , à ... ma mère , ajouta - t - elle , ces gages de mon souvenir . "
Elle prit une poignée de pierres précieuses , de colliers , de bijoux , les enveloppa dans un cachemire , et les présenta timidement à son père .
" Et que leur dirai - je de ta part ? demanda - t - il en paraissant frappé de l' hésitation que sa fille avait marquée avant de prononcer le mot de mère .
- Oh ! pouvez - vous douter de mon âme ! Je fais tous les jours des voeux pour leur bonheur .
- Hélène , reprit le vieillard en la regardant avec attention , ne dois - je plus te revoir ? Ne saurai - je donc jamais à quel motif ta fuite est due ?
- Ce secret ne m' appartient pas , dit - elle d' un ton grave . J' aurais le droit de vous l' apprendre , peut - être ne vous le dirais - je pas encore . J' ai souffert pendant dix ans des maux inouïs ... "
Elle ne continua pas et tendit à son père les cadeaux qu' elle destinait à sa famille . Le général , accoutumé par les événements de la guerre à des idées assez larges en fait de butin , accepta les présents offerts par sa fille , et se plut à penser que , sous l' inspiration d' une âme aussi pure , aussi élevée que celle d' Hélène , le capitaine parisien restait honnête homme en faisant la guerre aux Espagnols .
Sa passion pour les braves l' emporta .
Songeant qu' il serait ridicule de se conduire en prude , il serra vigoureusement la main du corsaire , embrassa son Hélène , sa seule fille , avec cette effusion particulière aux soldats , et laissa tomber une larme sur ce visage dont la fierté , dont l' expression mâle lui avaient plus d' une fois souri .
Le marin , fortement ému , lui donna ses enfants à bénir . Enfin , tous se dirent une dernière fois adieu par un long regard qui ne fut pas dénué d' attendrissement .
" Soyez toujours heureux ! " s' écria le grand - père en s' élançant sur le tillac .

FEMME DE 30 ANS (II, privé)
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