----- Revenir à l'écran précédent par la commande BACK -----

Elle n' acheva pas , elle froissa le papier par une contraction nerveuse , sonna sa femme de chambre , mit à la hâte un peignoir , chaussa les premiers souliers venus , s' enveloppa dans un châle , prit un chapeau ; puis elle sortit en recommandant à sa femme de chambre de dire au comte qu' elle était allée chez sa soeur , Mme du Tillet .
" Où avez - vous laissé votre maître ? demanda - t - elle au domestique de Raoul .
Au bureau du journal .
Allons - y " , dit - elle .
Au grand étonnement de sa maison , elle sortit à pied , avant neuf heures , en proie à une visible folie . Heureusement pour elle , la femme de chambre alla dire au comte que Madame venait de recevoir une lettre de Mme du Tillet qui l' avait mise hors d' elle , et venait de courir chez sa soeur , accompagnée du domestique qui lui avait apporté la lettre .
Vandenesse attendit le retour de sa femme pour recevoir des explications .
La comtesse monta dans un fiacre et fut rapidement menée au bureau du journal . à cette heure , les vastes appartements occupés par le journal dans un vieil hôtel de la rue Feydeau étaient déserts ; il ne s' y trouvait qu' un garçon de bureau , très étonné de voir une jeune et jolie femme égarée les traverser en courant , et lui demander où était M .
Nathan .
" Il est sans doute chez Mlle Florine , répondit - il en prenant la comtesse pour une rivale qui voulait faire une scène de jalousie .
Où travaille - t - il ici ? dit - elle .
Dans un cabinet dont la clef est dans sa poche .
Je veux y aller . "
Le garçon la conduisit à une petite pièce sombre donnant sur une arrière - cour , et qui jadis était un cabinet de toilette attenant à une chambre à coucher dont l' alcôve n' avait pas été détruite . Ce cabinet était en retour .
La comtesse , en ouvrant la fenêtre de la chambre , put voir par celle du cabinet ce qui s' y passait : Nathan râlait assis sur son fauteuil de rédacteur en chef .
" Enfoncez cette porte et taisez - vous , j' achèterai votre silence , dit - elle . Ne voyez - vous pas que M . Nathan se meurt ? "

UNE FILLE D EVE (II, privé)
Page: 356