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- Mais ... Je ne le savais ras . Je vais chez Mme d' Espard , je ne vous y trouve point .
Mais ...
- Le soir , à l' Opéra , mes yeux n' ont pas quitté le balcon . Chaque fois que la porte s' ouvrait , c' était des palpitations à me briser le coeur .
- Mais ...
- Quelle soirée ! Vous ne vous doutez pas de ces tempêtes du coeur .
Mais ...
- La vie s' use à ces émotions ...
Mais ...
- Eh bien , dit - elle .
Oui , la vie s' use , dit Nathan , et vous aurez en quelques mois dévoré la mienne . Vos reproches insensés m' arrachent aussi mon secret , dit - il . Ah ! vous n' êtes pas aimée ? ... vous l' êtes trop . "
Il peignit vivement sa situation , raconta ses veilles , détailla ses obligations à heure fixe , la nécessité de réussir les insatiables exigences d' un journal où l' on était tenu de juger , avant tout le monde , les événements sans se tromper , sous peine de perdre son pouvoir , enfin combien d' études rapides sur les questions qui passaient aussi rapidement que des nuages à cette époque dévorante .
Raoul eut tort en un moment . La marquise d' Espard le lui avait dit : rien de plus naïf qu' un premier amour . Il se trouva bientôt que la comtesse était coupable d' aimer trop . Une femme aimante répond à tout avec une jouissance , avec un aveu ou un plaisir .
En voyant se dérouler cette vie immense , la comtesse fut saisie d' admiration . Elle avait fait Nathan très grand , elle le trouva sublime . Elle s' accusa d' aimer trop , le pria de venir à ses heures ; elle aplatit ces travaux d' ambitieux par un regard levé vers le ciel .
Elle attendrait ! Désormais elle sacrifierait ses jouissances . En voulant n' être qu' un marchepied , elle était un obstacle ! ... elle pleura de désespoir .
" Les femmes , dit - elle les larmes aux yeux , ne peuvent donc qu' aimer , les hommes ont mille moyens d' agir ; nous autres , nous ne pouvons que penser , prier , adorer . "

UNE FILLE D EVE (II, privé)
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