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Aussi le secrétaire général étonnait - il souvent le ministre par sa profonde connaissance des affaires intimes . Bonneau tout de bon de ce Bonneau politique , Dutocq briguait l' honneur des secrets messages de des Lupeaulx , qui tolérait cet homme immonde en pensant que le hasard pouvait le lui rendre utile , ne fût - ce qu' à le tirer de peine , lui ou quelque grand personnage , par un honteux mariage .
L' un et l' autre ils se comprenaient bien . Dutocq comptait sur cette bonne fortune , en y voyant une bonne place , et il restait garçon .
Dutocq avait succédé à M . Poiret l' aîné , retiré dans une pension bourgeoise , et mis à la retraite en 1814 , époque à laquelle il y eut de grandes réformes parmi les employés .
Il demeurait à un cinquième étage , rue Saint - Louis - Saint - Honoré , près du Palais - Royal , dans une maison à allée . Passionné pour les collections de vieilles gravures , il voulait avoir tout Rembrandt et tout Charlet , tout Silvestre , Audran , Callot , Albrecht Dürer , etc .
Comme la plupart des gens à collections et ceux qui font eux - mêmes leur ménage , il prétendait acheter les choses à bon marché .
Il vivait dans une pension rue de Beaune , et passait la soirée dans le Palais - Royal , allant parfois au spectacle , grâce à du Bruel , qui lui donnait un billet d' auteur par semaine .
Un mot sur du Bruel .
Quoique suppléé par Sébastien auquel il abandonnait la pauvre indemnité que vous savez , du Bruel venait cependant au bureau , mais uniquement pour se croire , pour se dire sous - chef et toucher des appointements .
Il faisait les petits théâtres dans le feuilleton d' un journal ministériel , où il écrivait aussi les articles demandés par les ministres : position connue , définie et inattaquable . Du Bruel ne manquait d' ailleurs à aucune des petites ruses diplomatiques qui pouvaient lui concilier la bienveillance générale .
Il offrait une loge à Mme Rabourdin à chaque première représentation , la venait chercher en voiture et la ramenait , attention à laquelle elle se montrait sensible .
Aussi , Rabourdin , très tolérant et très peu tracassier avec ses employés , le laissait - il aller à ses répétitions , venir à ses heures , et travailler à ses vaudevilles .
M . le duc de Chaulieu savait du Bruel occupé d' un roman qui devait lui être dédié . Vêtu avec le laisser - aller du vaudevilliste , le sous - chef portait le matin un pantalon à pied , des souliers - chaussons , un gilet mis à la réforme , une redingote olive et une cravate noire .

LES EMPLOYES (VII, paris)
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