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En se trouvant mariée à un imbécile , elle pensait bien que la vie aurait pu aller autrement pour e le , mais elle soupçonnait le mieux sans vouloir le connaître . Toutes ses affections douces trouvaient un aliment dans son amour pour sa fille , à qui elle évitait les peines qu' elle avait supportées dans son enfance , et elle se croyait ainsi quitte envers le monde des sentiments . Pour sa fille seule , elle avait décidé son père à l' acte exorbitant de son association avec Falleix .
Falleix avait été présenté chez les Saillard par le vieux Bidault , qui lui prêtait de l' argent sur des marchandises . Falleix trouvait son vieux pays trop cher , il s' était plaint avec candeur devant les Saillard de ce que Gigonnet prenait dix - huit pour cent à un Auvergnat .
La vieille Mme Saillard avait osé blâmer son oncle .
" C' est bien parce qu' il est Auvergnat que je ne lui prends que dix - huit pour cent ! " répondit Gigonnet .
Falleix , âgé de vingt - huit ans , ayant fait une découverte et la communiquant à Saillard , paraissait avoir le coeur sur la main ( expression du vocabulaire Saillard ) et semblait promis à une grande fortune ; Élisabeth conçut aussitôt de le mitonner pour sa fille , et de former elle - même son gendre en calculant ainsi à sept ans de distance .
Martin Falleix rendit d' incroyables respects à Mme Baudoyer , à laquelle il reconnut un esprit supérieur .
Eût - il plus tard des millions , il devait toujours appartenir à cette maison , où il trouvait une famille . La petite Baudoyer était déjà stylée à lui apporter gentiment à boire et à placer son chapeau .
Au moment où M . Saillard rentra du ministère , le boston allait son train . Élisabeth conseillait Falleix . Mme Saillard tricotait au coin du feu en regardant le jeu du vicaire de Saint - Paul . M . Baudoyer , immobile comme un terme , employait son intelligence à calculer où étaient les cartes et faisait face à Mitral , venu de L' Isle - Adam pour les fêtes de Noël .
Personne ne se dérangea pour le caissier , qui se promena pendant quelques instants dans le salon , en montrant sa grosse face crispée par une méditation insolite .
" Il est toujours comme ça quand il dîne chez le ministre , ce qui n' arrive heureusement que deux fois par an , dit Mme Saillard , car ils me l' extermineraient . Saillard n' était point fait pour être dans le gouvernement .
- Ah çà , j' espère , Saillard , lui dit - elle à haute voix , que tu ne vas pas garder ici ta culotte de soie et ton habit de drap d' Elbeuf . Va donc quitter tout cela , ne l' use pas ici pour rien , ma mère .

LES EMPLOYES (VII, paris)
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