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Remercié de ses services par Louis XVIII , et mis en dehors de toute affaire , il était revenu dans ses propriétés déjà grevées depuis longtemps . Ces antécédents obscurs alors ( les initiés aux secrets du cabinet royal gardèrent le silence sur un si dangereux coopérateur ) rendirent cet homme l' objet d' une espèce de culte dans une ville dévouée aux Bourbons , et où les moyens les plus cruels de la chouannerie étaient admis comme de bonne guerre .
Les d' Esgrignon , les Casteran , le chevalier de Valois , enfin l' Aristocratie et l' Église ouvrirent leurs bras à ce diplomate royaliste et le mirent dans leur giron .
Cette protection fut corroborée du désir que les créanciers eurent d' être payés .
Ce misérable , le pendant de feu de La Chanterie , sut se contenir durant trois années , il afficha la plus haute dévotion et imposa silence à ses vices .
Pendant les premiers mois que les nouveaux mariés passèrent ensemble , il eut une espèce d' action sur sa femme ; il essaya de la corrompre par ses doctrines , si tant est que l' athéisme soit une doctrine , et par le ton plaisant avec lequel il parlait des principes les plus sacrés .
Ce diplomate de bas étage eut , dès son retour au pays , une liaison intime avec un jeune homme , criblé de dettes comme lui , mais qui se recommandait par autant de franchise et de courage qu' il a montré , lui , d' hypocrisie et de lâcheté .
Cet hôte , dont les agréments et le caractère , la vie aventureuse devaient influencer une jeune fille , fut , entre les mains du mari , comme un instrument , et il s' en servit pour appuyer ses infâmes théories .
Jamais la fille ne fit connaître à la mère l' abîme où le hasard l' avait jetée , car il faut renoncer à parler de prudence humaine en songeant aux minutieuses précautions prises par Mme de La Chanterie quand il fut question de marier sa fille unique .
Ce dernier coup , dans une vie aussi dévouée , aussi pure , aussi religieuse que celle d' une femme éprouvée par tant de malheurs , rendit Mme de La Chanterie d' une défiance envers elle - même qui l' isola d' autant plus de sa fille , que sa fille , en échange de sa mauvaise fortune , exigea presque sa liberté , domina sa mère , et la brusqua même quelquefois .

ENVERS DE L HISTOIRE (VIII, paris)
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