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- Ah ! votre voix me parle au moment où je voulais entendre une voix . Oui , Dieu vous adresse ici , monsieur . Je vais dire adieu au monde et vivre pour Dieu seul dans le silence et la retraite .
- Il est nécessaire , ma fille , de longtemps réfléchir à ce violent parti . Le mariage est une vie , le voile est une mort .
- Eh bien , la mort , la mort promptement , monsieur le curé , dit - elle avec une effrayante vivacité .
- La mort ! mais vous avez de grandes obligations à remplir envers la Société , mademoiselle . N' êtes - vous donc pas la mère des pauvres auxquels vous donnez des vêtements , du bois en hiver et du travail en été ? Votre grande fortune est un prêt qu' il faut rendre et vous l' avez saintement acceptée ainsi .
Vous ensevelir dans un couvent , ce serait de l' égoïsme , quant à rester vieille fille , vous ne le devez pas .
D' abord , pourriez - vous gérer seule votre immense fortune ? vous la perdriez peut - être . Vous auriez bientôt mille procès et vous seriez angariée en d' inextricables difficultés . Croyez votre pasteur : un époux vous est utile , vous devez conserver ce que Dieu vous a donné .
Je vous parle comme à une ouaille chérie . Vous aimez trop sincèrement Dieu pour ne pas faire votre salut au milieu du monde , dont vous êtes un des plus beaux ornements , et auquel vous donnez de saints exemples .
"
En ce moment , Mme des Grassins se fit annoncer . Elle venait amenée par la vengeance et par un grand désespoir .
" Mademoiselle , dit - elle . Ah ! voici M . le curé . Je me tais , je venais vous parler d' affaires , et je vois que vous êtes en grande conférence .
- Madame , dit le curé , je vous laisse le champ libre .
- Oh ! monsieur le curé , dit Eugénie , revenez dans quelques instants , votre appui m' est en ce moment bien nécessaire .
- Oui , ma pauvre enfant , dit Mme des Grassins .
- Que voulez - vous dire ? demandèrent Mlle Grandet et le curé .

EUGENIE GRANDET (III, provinc)
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