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Par calcul , de Marsay ancra Maxime de Trailles dans la société la plus élevée ; il le peignit comme un homme mûri par les passions , instruit par l' expérience , qui savait les choses et les hommes , à qui les voyages et une certaine faculté d' observation avaient donné la connaissance des intérêts européens , des cabinets étrangers et des alliances de toutes les familles continentales . De Marsay convainquit Maxime de la nécessité de se faire un honneur à lui ; il lui montra la discrétion moins comme une vertu que comme une spéculation ; il lui prouva que le pouvoir n' abandonnerait jamais un instrument solide et sûr , élégant et poli .
" En politique , on ne fait chanter qu' une fois ! " lui dit - il en le blâmant d' avoir fait une menace .
Maxime était homme à sonder la profondeur de ce mot .
De Marsay mort , le comte Maxime de Trailles était retombé dans sa vie antérieure . Il allait jouer tous les ans aux Eaux , il revenait passer l' hiver à Paris ; mais s' il recevait quelques sommes importantes , venues des profondeurs de certaines caisses extrêmement avares , cette demi - solde due à l' homme intrépide qu' on pouvait employer d' un moment à l' autre , et confident des mystères de la contre - diplomatie , était insuffisante pour les dissipations d' une vie aussi splendide que celle du roi des dandies , du tyran de quatre ou cinq clubs parisiens .
Aussi le comte Maxime avait - il souvent des inquiétudes sur la question financière .
Sans propriété , il n' avait jamais pu consolider sa position en se faisant nommer député ; puis , sans fonctions ostensibles , il lui était impossible de mettre le couteau sous la gorge à quelque ministère pour se faire nommer pair de France .
Or , il se voyait gagné par le temps , car ses profusions avaient entamé sa personne aussi bien que ses diverses fortunes .
Malgré ses beaux dehors , il se connaissait et ne pouvait se tromper sur lui - même , il pensait à faire une fin , à se marier .
Homme d' esprit , il ne s' abusait pas sur sa considération , il savait bien qu' elle était mensongère . Il ne devait donc y avoir de femmes pour lui ni dans la haute société de Paris , ni dans la bourgeoisie ; il lui fallait prodigieusement de méchanceté , de bonhomie apparente et de services rendus pour se faire supporter , car chacun désirait sa chute ; et une mauvaise veine pouvait le perdre .

LE DEPUTE D ARCIS (VIII, politi)
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