----- Revenir à l'écran précédent par la commande BACK -----

Depuis , la mère Beauvisage , devenue veuve , avait , en 1813 , encore soustrait son fils unique à l' enrôlement des Gardes d' honneur , grâce au crédit du comte de Gondreville . En 1813 , Philéas , âgé de vingt - un ans , s' était déjà voué depuis trois ans au commerce pacifique de la bonneterie . En se trouvant alors à la fin du bail de Bellache , la vieille fermière refusa de le continuer . Elle se voyait en effet assez d' ouvrage pour ses vieux jours à faire valoir ses biens . Pour que rien ne troublât sa vieillesse , elle voulut procéder chez M .
Grévin , le notaire d' Arcis , à la liquidation de la succession de son mari , quoique son fils ne lui demandât aucun compte ; il en résulta qu' elle lui devait cent cinquante mille francs environ .
La bonne femme ne vendit point ses terres , dont la plus grande partie provenait du malheureux Michu , l' ancien régisseur de la maison de Simeuse , elle remit la somme en argent à son fils , en l' engageant à traiter de la maison de son patron , le fils du vieux juge de paix , dont les affaires étaient devenues si mauvaises , qu' on suspecta , comme on l' a dit déjà , sa mort d' avoir été volontaire .
Philéas Beauvisage , garçon sage et plein de respect pour sa mère , eut bientôt conclu l' affaire avec son patron ; et comme il tenait de ses parents la bosse que les phrénologistes appellent l' acquisivité , son ardeur de jeunesse se porta sur ce commerce qui lui parut magnifique et qu' il voulut agrandir par la spéculation .
Ce prénom de Philéas , qui peut paraître extraordinaire , est une des mille bizarreries dues à la Révolution .
Attachés à la famille Simeuse , et conséquemment bons catholiques , les Beauvisage avaient voulu faire baptiser leur enfant .
Le curé de Cinq - Cygne , l' abbé Goujet , consulté par les fermiers , leur conseilla de donner à leur fils Philéas pour patron , un saint dont le nom grec satisferait la Municipalité ; car cet enfant naquit à une époque où les enfants s' inscrivaient à l' état civil sous les noms bizarres du calendrier républicain .
En 1814 , la bonneterie , commerce peu chanceux en temps ordinaires , était soumise à toutes les variations des prix du coton . Le prix du coton dépendait du triomphe ou de la défaite de l' empereur Napoléon dont les adversaires , les généraux anglais , disaient en Espagne : " La ville est prise , faites avancer les ballots ... "

LE DEPUTE D ARCIS (VIII, politi)
Page: 751