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De même que nous avons l' existence du jour et de la nuit , la veille et le sommeil , ainsi j' aurai mon existence fleurie à Paris , mon existence de travail aux Indes ; un rêve pénible , une réalité délicieuse : je vivrai si bien dans ta réalité que mes jours seront des rêves .
J' aurai mes souvenirs , je reprendrai chant par chant ce beau poème de cinq ans , je me rappellerai les jours où tu te plaisais à briller , où par une toilette aussi bien que par un déshabillé tu te faisais nouvelle à mes yeux .
Je reprendrai sur mes lèvres le goût de nos festins . Oui , chère ange , je pars comme un homme voué à une entreprise dont la réussite lui donnera sa belle maîtresse .
Le passé sera pour moi comme ces rêves du désir qui précèdent la possession , et que souvent la possession détrompe , mais que tu as toujours agrandis . Je reviendrai pour trouver une femme nouvelle , l' absence ne te donnera - t - elle pas des charmes nouveaux ? O mon bel amour , ma Natalie , que je sois une religion pour toi .
Sois bien l' enfant que je vois endormie ! Si tu trahissais une confiance aveugle , Natalie , tu n' aurais pas à craindre ma colère , tu dois en être sûre ; je mourrais silencieusement .
Mais la femme ne trompe pas l' homme qui la laisse libre , car la femme n' est jamais lâche . Elle se joue d' un tyran ; mais une trahison facile et qui donnerait la mort , elle y renonce .
Non , je n' y pense pas . Grâce pour ce cri si naturel à un homme . Chère ange , tu verras de Marsay , il sera le locataire de notre hôtel et te le laissera .
Ce bail simulé était nécessaire pour éviter des pertes inutiles . Les créanciers , ignorant que leur paiement est une question de temps , auraient pu saisir le mobilier et l' usufruit de notre hôtel .
Sois bonne pour de Marsay : j' ai la plus entière confiance dans sa capacité , dans sa loyauté . Prends - le pour défenseur et pour conseil , fais - en ton menin . Quelles que soient ses occupations , il sera toujours à toi .
Je le charge de veiller à ma liquidation . S' il avançait quelque somme de laquelle il eût besoin plus tard , je compte sur toi pour la lui remettre . Songe que je ne te laisse pas à de Marsay , mais à toi - même ; en te l' indiquant , je ne te l' impose pas .
Hélas ! il m' est impossible de te parler d' affaires , je n' ai plus qu' une heure à rester là près de toi . Je compte tes aspirations , je tâche de retrouver tes pensées dans les rares accidents de ton sommeil , ton souffle ranime les heures fleuries de notre amour .

CONTRAT DE MARIAGE (III, privé)
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