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Au troisième champ dans lequel il entra , il aperçut une femme d' une trentaine d' années , occupée à labourer la terre à la houe , et qui , toute courbée , travaillait avec courage ; tandis qu' un petit garçon âgé d' environ sept à huit ans , armé d' une serpe , secouait le givre de quelques ajoncs qui avaient poussé çà et là , les coupait et les mettait en tas . Au bruit que fit Hulot en retombant lourdement de l' autre côté de l' échalier , le petit gars et sa mère levèrent la tête .
Hulot prit facilement cette jeune femme pour une vieille . Des rides venues avant le temps sillonnaient le front et la peau du cou de la Bretonne , elle était si grotesquement vêtue d' une peau de bique usée , que sans une robe de toile jaune et sale , marque distinctive de son sexe , Hulot n' aurait su à quel sexe la paysanne appartenait , car les longues mèches de ses cheveux noirs étaient cachées sous un bonnet de laine rouge .
Les haillons dont le petit gars était à peine couvert en laissaient voir la peau .
" Ho ! la vieille , cria Hulot d' un ton bas à cette femme en s' approchant d' elle , où est le Gars ? "
En ce moment les vingt Contre - Chouans qui suivaient Hulot franchirent les enceintes du champ .
" Ah ! pour aller au Gars , faut que vous retourniez d' où vous venez , répondit la femme après avoir jeté un regard de défiance sur la troupe .
- Est - ce que je te demande le chemin du faubourg du Gars à Fougères , vieille carcasse ? répliqua brutalement Hulot . Par saint Anne d' Auray , as - tu vu passer le Gars ?
- Je ne sais pas ce que vous voulez dire , répondit la femme en se courbant pour reprendre son travail .
- Garce damnée , veux - tu donc nous faire avaler par les Bleus qui nous poursuivent ? " s' écria Hulot .
à ces paroles la femme releva la tête et jeta un nouveau regard de méfiance sur les Contre - Chouans en leur répondant : " Comment les Bleus peuvent - ils être à vos trousses ? j' en viens de voir passer sept à huit qui regagnent Fougères par le chemin d' en bas .
- Ne dirait - on pas qu' elle va nous mordre avec son nez ? reprit Hulot . Tiens , regarde , vieille bique . "
Et le commandant lui montra du doigt , à une cinquantaine de pas en arrière , trois ou quatre de ses sentinelles dont les chapeaux , les uniformes et les fusils étaient faciles à reconnaître .
" Veux - tu laisser égorger ceux que Marche - à - terre envoie au secours du Gars que les Fougerais veulent prendre ? reprit - il avec colère .
LES CHOUANS (VIII, milit)
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