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Je vous ai à plusieurs reprises offert et mon coeur et ma main . Vous ne m' avez pas trouvé digne de vous ; et peut - être avez - vous raison ; mais si vous vous trouvez trop haut placée , trop belle , ou trop grande pour moi , je saurai bien vous faire descendre jusqu' à moi . Mon ambition et mes maximes vous ont donné peu d' estime pour moi ; et , franchement , vous avez tort .
Les hommes ne valent que ce que je les estime , presque rien . J' arriverai certes à une haute position dont les honneurs vous flatteront . Qui pourra mieux vous aimer , qui vous laissera plus souverainement maîtresse de lui , si ce n' est l' homme par qui vous êtes aimée depuis cinq ans ? Quoique je risque de vous voir prendre de moi une idée qui me sera défavorable , car vous ne concevez pas qu' on puisse renoncer par excès d' amour à la personne qu' on idolâtre , je vais vous donner la mesure du désintéressement avec lequel je vous adore .
N' agitez pas ainsi votre jolie tête .
Si le marquis vous aime , épousez - le ; mais auparavant , assurez - vous bien de sa sincérité .
Je serais au désespoir de vous savoir trompée , car je préfère votre bonheur au mien . Ma résolution peut vous étonner , mais ne l' attribuez qu' à la prudence d' un homme qui n' est pas assez niais pour vouloir posséder une femme malgré elle .
Aussi est - ce moi et non vous que j' accuse de l' inutilité de mes efforts . J' ai espéré vous conquérir à force de soumission et de dévouement , car depuis longtemps , vous le savez , je cherche à vous rendre heureuse suivant mes principes ; mais vous n' avez voulu me récompenser de rien .
- Je vous ai souffert près de moi , dit - elle avec hauteur .
- Ajoutez que vous vous en repentez ...
- Après l' infâme entreprise dans laquelle vous m' avez engagée , dois - je encore vous remercier ...
- En vous proposant une entreprise qui n' était pas exempte de blâme pour des esprits timorés , reprit - il audacieusement , je n' avais que votre fortune en vue . Pour moi , que je réussisse ou que j' échoue , je saurai faire servir maintenant tout espèce de résultat au succès de mes desseins .
Si vous épousez Montauran , je serais charmé de servir utilement la cause des Bourbons , à Paris , où je suis membre du club de Clichy .

LES CHOUANS (VIII, milit)
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