----- Revenir à l'écran précédent par la commande BACK -----

Hyde de Neuville et d' Andigne ont eu il y a cinq jours une conférence avec le Premier consul sur la question de rétablir Sa Majesté Louis XVIII . Si je m' apprête en ce moment pour aller risquer un coup de main si téméraire , c' est uniquement pour ajouter à ces négociations le poids de nos souliers ferrés . Ignorez - vous que tous les chefs de la Vendée et même Fontaine parlent de se soumettre .
Ah ! monsieur , l' on a évidemment trompé les princes sur l' état de la France . Les dévouements dont on les entretient sont des dévouements de position .
L' abbé , si j' ai mis le pied dans le sang , je ne veux m' y soumettre jusqu' à la ceinture qu' à bon escient . Je me suis dévoué au Roi et non pas à quatre cerveaux brûlés , à des hommes perdus de dettes comme Rifoël , à des chauffeurs , à ...
- Dites tout de suite , monsieur , à des abbés qui perçoivent des contributions sur le grand chemin pour soutenir la guerre , reprit l' abbé Gudin .
- Pourquoi ne le dirais - je pas ? répondit aigrement le marquis . Je dirai plus , les temps héroïques de la Vendée sont passés ...
- Monsieur le marquis , nous saurons faire des miracles sans vous .
- Oui , comme celui de Marie Lambrequin , répondit en riant le marquis . Allons , sans rancune , l' abbé ! Je sais que vous payez de votre personne , et tirez un Bleu aussi bien que vous dites un oremus . Dieu aidant , j' espère vous faire assister , une mitre en tête , au sacre du Roi . "
Cette dernière phrase eut sans doute un pouvoir magique sur l' abbé , car on entendit sonner une carabine , et il s' écria : " J' ai cinquante cartouches dans mes poches , monsieur le marquis , et ma vie est au Roi . "
" Voilà encore un de mes débiteurs , dit l' avare à Mlle de Verneuil . Je ne parle pas de cinq à six cents malheureux écus qu' il m' a empruntés , mais d' une dette de sang qui , j' espère , s' acquittera . Il ne lui arrivera jamais autant de mal que je lui en souhaite , à ce sacré jésuite ; il avait juré la mort de mon frère , et soulevait le pays contre lui .
Pourquoi ? parce que le pauvre homme avait eu peur des nouvelles lois .
" Après avoir appliqué son oreille à un certain endroit de sa cachette : " Les voilà qui décampent , tous ces brigands - là , dit - il . Ils vont faire encore quelque miracle ! Pourvu qu' ils n' essaient pas de me dire adieu comme la dernière fois , en mettant le feu à ma maison .
"

LES CHOUANS (VIII, milit)
Page:1090