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Ces deux officiers devaient prendre à propos les Chouans en flanc et les empêcher de s' égailler . Ce mot du patois de ces contrées exprime l' action de se répandre dans la campagne , où chaque paysan allait se poster de manière à tirer les Bleus sans danger ; les troupes républicaines ne savaient plus alors où prendre leurs ennemis .
Ces dispositions , ordonnées par le commandant avec la rapidité voulue en cette circonstance , communiquèrent sa confiance aux soldats , et tous marchèrent en silence sur les Chouans . Au bout de quelques minutes exigées par la marche des deux corps l' un vers l' autre , il se fit une décharge à bout portant qui répandit la mort dans les deux troupes .
En ce moment , les deux ailes républicaines , auxquelles les Chouans n' avaient pu rien opposer , arrivèrent sur leurs flancs , et par une fusillade vive et serrée , semèrent la mort et le désordre au milieu de leurs ennemis .
Cette manoeuvre rétablit presque l' équilibre numérique entre les deux partis .
Mais le caractère des Chouans comportait une intrépidité et une constance à toute épreuve ; ils ne bougèrent pas , leur perte ne les ébranla point , ils se serrèrent et tâchèrent d' envelopper la petite troupe noire et bien alignée des Bleus , qui tenait si peu d' espace qu' elle ressemblait à une reine d' abeilles au milieu d' un essaim .
Il s' engagea donc un de ces combats horribles où le bruit de la mousqueterie , rarement entendu , est remplacé par le cliquetis de ces luttes à armes blanches pendant lesquelles on se bat corps à corps , et où , à courage égal , le nombre décide de la victoire .
Les Chouans l' auraient emporté de prime abord si les deux ailes , commandées par Merle et Gérard , n' avaient réussi à opérer deux ou trois décharges qui prirent en écharpe la queue de leurs ennemis .
Les Bleus de ces deux ailes auraient dû rester dans leurs positions et continuer ainsi d' ajuster avec adresse leurs terribles adversaires ; mais , animés par la vue des dangers que courait cet héroïque bataillon de soldats alors complètement entouré par les Chasseurs du Roi , ils se jetèrent sur la route comme des furieux , la baïonnette en avant , et rendirent la partie plus égale pour quelques instants .
Les deux troupes se livrèrent alors à un acharnement aiguisé par toute la fureur et la cruauté de l' esprit de parti qui firent de cette guerre une exception .
Chacun , attentif à son danger , devint silencieux .
La scène fut sombre et froide comme la mort .

LES CHOUANS (VIII, milit)
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