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LE CURÉ DE VILLAGE
CHAPITRE PREMIER
VÉRONIQUE
Dans le Bas = Limoges , au coin de la rue de la Vieille = Poste et de la rue de la Cité , se trouvait , il y a trente ans , une de ces boutiques auxquelles il semble que rien n' ait été changé depuis le Moyen Age .
De grandes dalles cassées en mille endroits , posées sur le sol qui se montrait humide par places , auraient fait tomber quiconque n' eût pas observé les creux et les élévations de ce singulier carrelage .
Les murs poudreux laissaient voir une bizarre mosaïque de bois et de briques , de pierres et de fer tassés avec une solidité due au temps , peut = être au hasard . Depuis plus de cent ans le plancher , composé de poutres colossales , pliait sans rompre sous le poids des étages supérieurs .
Bâtis en colombage , ces étages étaient à l' extérieur couverts en ardoises clouées de manière à dessiner des figures géométriques , et conservaient une image naïve des constructions bourgeoises du vieux temps .
Aucune des croisées encadrées de bois , jadis brodées de sculptures aujourd' hui détruites par les intempéries de l' atmosphère , ne se tenait d' aplomb : les unes donnaient du nez , les autres rentraient , quelques = unes voulaient se disjoindre ; toutes avaient du terreau apporté on ne sait comment dans les fentes creusées par la pluie , et d' où s' élançaient au printemps quelques fleurs légères , de timides plantes grimpantes , des herbes grêles .
La mousse veloutait les toits et les appuis .
Le pilier du coin , quoiqu' en maçonnerie composite , c' est = à = dire de pierres mêlées de briques et de cailloux , effrayait le regard par sa courbure ; il paraissait devoir céder quelque jour sous le poids de la maison , dont le pignon surplombait d' environ un demi = pied .

LE CURE DE VILLAGE (IX, campagn)
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