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" Vous comprenez , mon cher monsieur , dit - elle en terminant , qu' il faudrait bien savoir à quoi s' en tenir sur ce que M . Pons compte faire pour moi , dans le cas où il viendrait à mourir ; c' est ce que je ne souhaite guère , car ces deux innocents à soigner , voyez - vous , madame , c' est ma vie ; mais si l' un d' eux me manque , je soignera l' autre .
Moi , la Nature m' a bâtie pour être la rivale de la Maternité .
Sans quelqu' un à qui je m' intéresse , de qui je me fais un enfant , je ne saurais que devenir ... Donc , si M . Poulain le voulait , il me rendrait un service que je saurais bien reconnaître , ce serait de parler de moi à M .
Pons . Mon Dieu ! mille francs de viager est - ce trop ? je vous le demande ... C' est autant de gagné pour M . Schmucke ... Pour lors , notre cher malade m' a donc dit qu' il me recommanderait à ce pauvre Allemand , qui serait donc , dans son idée , son héritier ... Mais qu' est - ce qu' un homme qui ne sait pas coudre deux idées en français , et qui d' ailleurs est capable de s' en aller en Allemagne , tant il sera désespéré de la mort de son ami ? ...
- Ma chère madame Cibot , répondit le docteur devenu grave , ces sortes d' affaires ne concernent point les médecins , et l' exercice de ma profession me serait interdit si l' on savait que je me suis mêlé des dispositions testamentaires d' un de mes clients .
La loi ne permet pas à un médecin d' accepter un legs de son malade ...
- Quelle bête de loi ! car qu' est - ce qui m' empêche de partager mon legs avec vous ? répondit sur - le - champ la Cibot .
- J' irai plus loin , dit le docteur , ma conscience de médecin m' interdit de parler à M . Pons de sa mort . D' abord , il n' est pas assez en danger pour cela ; puis , cette conversation de ma part lui causerait un saisissement qui pourrait lui faire un mal réel , et rendre alors sa maladie mortelle ...
- Mais je ne prends pas de mitaines , s' écria Mme Cibot , pour lui dire de mettre ses affaires en ordre et il ne s' en porte pas plus mal ... Il est fait à cela ! ... ne craignez rien .
- Ne me dites rien de plus , ma chère madame Cibot ! ... Ces choses ne sont pas du domaine de la médecine , elles regardent les notaires ...

LE COUSIN PONS (VII, paris)
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