----- Revenir à l'écran précédent par la commande BACK -----

Le phénomène expliqué ci - dessus , celui de la concentration des forces morales chez tous les gens grossiers qui , n' usant pas leurs facultés intelligentielles ainsi que les gens du monde par une dépense journalière , les trouvent fortes et puissantes au moment où joue dans leur esprit cette arme redoutable appelée l' idée fixe , se manifesta chez la Cibot à un degré supérieur . De même que l' idée fixe produit les miracles des évasions et les miracles du sentiment , cette portière , appuyée par la cupidité , devint aussi forte qu' un Nucingen aux abois , aussi spirituelle sous sa bêtise que le séduisant La Palférine .
Quelques jours après , sur les sept heures du matin , en voyant Rémonencq occupé d' ouvrir sa boutique , elle alla chattement à lui .
" Comment faire pour savoir la vérité sur la valeur des choses entassées chez mes messieurs ? lui demanda - t - elle .
- Ah ! c' est bien facile , répondit le marchand de curiosités dans son affreux charabia qu' il est inutile de continuer à figurer pour la clarté du récit . Si vous voulez jouer franc jeu avec moi , je vous indiquerai un appréciateur , un bien honnête homme , qui saura la valeur des tableaux à deux sous près ...
- Qui ?
- M . Magus , un Juif qui ne fait plus d' affaires que pour son plaisir . "
Élie Magus , dont le nom est trop connu dans La Comédie humaine pour qu' il soit nécessaire de parler de lui , s' était retiré du commerce des tableaux et des curiosités , en imitant , comme marchand , la conduite que Pons avait tenue comme amateur .
Les célèbres appréciateurs , feu Henry , MM . Pigeot et Moret , Théret , Georges et Roëhn , enfin , les experts du Musée , étaient tous des enfants , comparés à Élie Magus , qui devinait un chef - d' oeuvre sous une crasse centenaire , qui connaissait toutes les Écoles et l' écriture de tous les peintres .
Ce Juif , venu de Bordeaux à Paris , avait quitté le commerce en 1835 , sans quitter les dehors misérables qu' il gardait , selon les habitudes de la plupart des Juifs , tant cette race est fidèle à ses traditions .
Au Moyen Age , la persécution obligeait les Juifs à porter des haillons pour déjouer les soupçons , à toujours se plaindre , pleurnicher , crier à la misère . Ces nécessités d' autrefois sont devenues , comme toujours , un instinct de peuple , un vice endémique .

LE COUSIN PONS (VII, paris)
Page: 593