----- Revenir à l'écran précédent par la commande BACK -----

" Je ne vous croyais pas méchant , mon cousin ; mais si , de tout ce que j' entends dire de vous , le quart seulement est vrai , vous êtes un homme bien faux ... Oh ! ne vous justifiez pas ! ajouta - t - elle vivement en voyant faire à Pons un geste , c' est inutile par deux raisons : la première , c' est que je n' ai le droit d' accuser , ni de juger , ni de condamner personne , sachant par moi - même que ceux qui paraissent avoir le plus de torts peuvent offrir des excuses ; la seconde , c' est que vos raisons ne serviraient à rien . M . Berthier , qui a fait le contrat de Mlle de Marville et du vicomte Popinot , est tellement irrité contre vous que , s' il apprenait que je vous ai dit un seul mot , que je vous ai parlé pour la dernière fois , il me gronderait .
Tout le monde est contre vous .
- Je le vois bien , madame ! " répondit d' une voix émue le pauvre musicien qui salua respectueusement la femme du notaire .
Et il reprit péniblement le chemin de la rue de Normandie en s' appuyant sur le bras de Schmucke avec une pesanteur qui trahit au vieil Allemand une défaillance physique courageusement combattue . Cette troisième rencontre fut comme le verdict prononcé par l' agneau qui repose aux pieds de Dieu , le courroux de cet ange des pauvres , le symbole des Peuples , est le dernier mot du ciel .
Les deux amis arrivèrent chez eux sans avoir échangé une parole .
En certaines circonstances de la vie , on ne peut que sentir son ami près de soi . La consolation parlée aigrit la plaie , elle en révèle la profondeur . Le vieux pianiste avait , comme vous le voyez , le génie de l' amitié , la délicatesse de ceux qui , ayant beaucoup souffert , savent les coutumes de la souffrance .
Cette promenade devait être la dernière du bonhomme Pons . Le malade tomba d' une maladie dans une autre . D' un tempérament sanguin - bilieux , la bile passa dans le sang , il fut pris par une violente hépatite .
Ces deux maladies successives étant les seules de sa vie , il ne connaissait point de médecin ; et , dans une pensée toujours excellente d' abord , maternelle même , la sensible et dévouée Cibot amena le médecin du quartier .
à Paris dans chaque quartier , il existe un médecin dont le nom et la demeure ne sont connus que de la classe inférieure , des petits bourgeois , des portiers , et qu' on nomme conséquemment le médecin du quartier .
Ce médecin , qui fait les accouchements et qui saigne , est en médecine ce qu' est dans les Petites - Affiches le domestique pour tout faire . Obligé d' être bon pour les pauvres , assez expert à cause de sa longue pratique , il est généralement aimé .

LE COUSIN PONS (VII, paris)
Page: 569