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La deuxième Mme Brunner fut ce que sont les jeunes Allemandes , quand elles sont méchantes et légères . Elle dissipa sa fortune , et vengea la première Mme Brunner en rendant son mari l' homme le plus malheureux dans son intérieur qui fût connu sur le territoire de la ville libre de Francfort - sur - le - Main où dit - on , les millionnaires vont faire rendre une loi municipale qui contraigne les femmes à les chérir exclusivement .
Cette Allemande aimait les différents vinaigres que les Allemands appellent communément vins du Rhin .
Elle aimait les articles - Paris . Elle aimait à monter à cheval . Elle aimait la parure . Enfin la seule chose coûteuse qu' elle n' aimât pas , c' était les femmes . Elle prit en aversion le petit Fritz , et l' aurait rendu fou , si ce jeune produit du calvinisme et du mosaïsme n' avait pas eu Francfort pour berceau , et la maison Virlaz de Leipzig pour tutelle ; mais l' oncle Virlaz , tout à ses fourrures , ne veillait qu' aux marcs banco , il laissa l' enfant en proie à la marâtre .
Cette hyène était d' autant plus furieuse contre ce chérubin , fils de la belle Mme Brunner , que , malgré des efforts dignes d' une locomotive , elle ne pouvait pas avoir d' enfant . Mue par une pensée diabolique , cette criminelle Allemande lança le jeune Fritz , à l' âge de vingt et un ans , dans des dissipations antigermaniques .
Elle espéra que le cheval anglais , le vinaigre du Rhin et les Marguerites de Goethe dévoreraient l' enfant de la juive et sa fortune ; car l' oncle Virlaz avait laissé un bel héritage à son petit Fritz au moment où celui - ci devint majeur .
Mais si les roulettes des Eaux et les amis du Vin , au nombre desquels était Wilhem Schwab , achevèrent le capital Virlaz , le jeune enfant prodigue demeura pour servir , selon les voeux du Seigneur , d' exemple aux puînés de la ville de Francfort - sur - le - Main , où toutes les familles l' emploient comme un épouvantail pour garder leurs enfants sages et effrayés dans leurs comptoirs de fer doublés de marcs banco .
Au lieu de mourir à la fleur de l' âge , Fritz Brunner eut le plaisir de voir enterrer sa marâtre dans un de ces charmants cimetières où les Allemands , sous prétexte d' honorer leurs morts , se livrent à leur passion effrénée pour l' horticulture .

LE COUSIN PONS (VII, paris)
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