----- Revenir à l'écran précédent par la commande BACK -----

- Peut - être , chère enfant ! Hier , pendant le bal , j' ai beaucoup réfléchi aux dangers de notre réunion . Si ma présence te nuisait , si les petits actes par lesquels tu dois lentement établir ton autorité de femme étaient attribués à mon influence , ton ménage ne deviendrait - il pas un enfer ? Au premier froncement de sourcils que se permettrait ton mari , fière comme je le suis , ne quitterais - je pas à l' instant la maison ? Si je la dois quitter un jour , mon avis est de n' y pas entrer . Je ne pardonnerais pas à ton mari la désunion qu' il mettrait entre nous . Au contraire , quand tu seras la maîtresse , lorsque ton mari sera pour toi ce que ton père était pour moi , ce malheur ne sera plus à craindre .
Quoique cette politique doive coûter à un coeur jeune et tendre comme est le tien , ton bonheur exige que tu sois chez toi souveraine absolue .
- Pourquoi , ma mère , me disiez - vous alors que je dois lui obéir ?
- Chère fillette , pour qu' une femme commande , elle doit avoir l' air de toujours faire ce que veut son mari . Si tu ne le savais pas , tu pourrais par une révolte intempestive gâter ton avenir . Paul est un jeune homme faible , il pourrait se laisser dominer par un ami , peut - être même pourrait - il tomber sous l' empire d' une femme , qui te feraient subir leurs influences .
Préviens ces chagrins en te rendant maîtresse de lui .
Ne vaut - il pas mieux qu' il soit gouverné par toi que de l' être par un autre ?
- Certes , dit Natalie . Moi je ne puis vouloir que son bonheur .
- Il m' est bien permis , ma chère enfant , de penser exclusivement au tien , et de vouloir que , dans une affaire si grave , tu ne te trouves pas sans boussole au milieu des écueils que tu vas rencontrer .
- Mais , ma mère chérie , ne sommes - nous donc pas assez fortes toutes les deux pour rester ensemble près de lui , sans avoir à redouter ce froncement de sourcils que vous paraissez redouter ? Paul t' aime , maman .
- Oh ! oh ! il me craint plus qu' il ne m' aime . Observe - le bien aujourd' hui quand je lui dirai que je vous laisse aller à Paris sans moi , tu verras sur sa figure , quelle que soit la peine qu' il prendra pour la dissimuler , une joie intérieure .
- Pourquoi ? demanda Natalie .
- Pourquoi ? chère enfant ! Je suis comme saint Jean - Bouche - d' Or , je le lui dirai à lui - même , et devant toi .
- Mais si je me marie à la seule condition de ne te pas quitter ? dit Natalie .

CONTRAT DE MARIAGE (III, privé)
Page: 607