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Chacune des trois croisées du premier étage se recommandait également par ses broderies de pierre , que la brique des murs faisait ressortir . Au rez - de - chaussée , un double perron décoré fort délicatement , et dont la tribune se distinguait par un lacs d' amour , menait à une porte d' entrée en bossages taillés à la vénitienne en pointe de diamant système de décors qui se trouvait dans la croisée droite et dans celle de gauche .
Un jardin distribué planté à la mode de ce temps , et où abondaient les fleurs rares , occupait derrière la maison un espace égal en étendue à celui de la cour . Une vigne tapissait les murailles . Au milieu d' un gazon s' élevait un pin argenté .
Les plates - bandes étaient séparées de ce gazon par des allées sinueuses menant à un petit bosquet d' ifs taillés qui se trouvait au fond . Les murs revêtus de mosaïques composées de différents cailloux assortis offraient à l' oeil des dessins grossiers , il est vrai , mais qui plaisaient par la richesse des couleurs en harmonie avec celles des fleurs .
La façade du jardin , semblable à celle de la cour , offrait comme elle un joli balcon travaillé qui surmontait la porte et embellissait la croisée du milieu .
Sur le jardin comme sur la cour , les ornements de cette maîtresse croisée , avancée de quelques pieds , montaient jusqu' à la frise , en sorte qu' elle simulait un petit pavillon semblable à une lanterne .
Les appuis des autres croisées étaient incrustés de marbres précieux encadrés dans la pierre .
Malgré le goût exquis qui respirait dans cette maison , elle avait une physionomie triste . Le jour y était obscurci par les maisons voisines et par les toits de l' hôtel d' Alençon qui projetaient une ombre sur la cour et sur le jardin , puis il y régnait un profond silence .
Mais ce silence , ce clair - obscur , cette solitude faisaient du bien à l' âme qui pouvait s' y livrer à une seule pensée , comme dans un cloître où l' on se recueille , ou comme dans la coite maison où l' on aime .
Qui ne devinerait maintenant les recherches intérieures de cette retraite , seul lieu de son royaume où l' avant - dernier Valois pouvait épancher son âme , dire ses douleurs , déployer son goût pour les arts et se livrer à la poésie qu' il aimait , toutes affections contrariées par les soucis de la plus pesante des royautés .

CATHERINE MEDICIS (XI, philo)
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