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La chambre où l' on avait dressé le lit de François II est contiguë à la grande salle du Bailliage . Elle était alors revêtue de boiseries en chêne . Le plafond , composé de petites planches longues savamment ajustées et peintes , offrait des arabesques bleues sur un fond d' or , dont une partie arrachée il y a cinquante ans bientôt a été recueillie par un amateur d' antiquités .
Cette chambre , tendue de tapisseries et sur le plancher de laquelle s' étendait un tapis , était si sombre , que les torchères allumées y jetaient peu de lumière . Le vaste lit , à quatre colonnes et à rideaux de soie , ressemblait à un tombeau .
D' un côté de ce lit , au chevet , se tenaient la reine Marie et le cardinal de Lorraine . Catherine était assise dans un fauteuil . Le fameux Jean Chapelain , médecin de service , et qui fut depuis le premier médecin de Charles IX , se trouvait debout à la cheminée .
Le plus grand silence régnait . Le jeune Roi , maigre , pâle , comme perdu dans ses draps , laissait à peine voir sur l' oreiller sa petite figure grimée .
La duchesse de Guise , assise sur une escabelle , assistait la jeune reine Marie , et du côté de Catherine , dans l' embrasure de la croisée , Mme de Fiesque épiait les gestes et les regards de la reine mère , car elle connaissait les dangers de sa position .
Dans la salle , malgré l' heure avancée de la soirée , M . de Cypierre , gouverneur du duc d' Orléans , et nomme gouverneur de la ville , occupait un coin de la cheminée avec les deux Gondi . Le cardinal de Tournon , qui dans cette crise épousa les intérêts de la reine mère en se voyant traité comme un inférieur par le cardinal de Lorraine , de qui certes il était ecclésiastiquement l' égal , causait à voix basse avec les Gondi .
Les maréchaux de Vieilleville et de Saint - André , le garde des Sceaux , qui présidait les États , s' entretenaient à voix basse des dangers auxquels les Guise étaient exposés .
Le lieutenant général du royaume traversa la salle en y jetant un rapide coup d' oeil , et y salua le duc d' Orléans qu' il y aperçut .
" Monseigneur , dit - il , voici qui peut vous apprendre à connaître les hommes : la noblesse catholique du royaume est chez un prince hérétique , en croyant que les États donneront la régence aux héritiers du traître qui fit retenir si longtemps en prison votre illustre grand - père ! "

CATHERINE MEDICIS (XI, philo)
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