----- Revenir à l'écran précédent par la commande BACK -----

" Non , je n' irai pas plus loin ! s' écria - t - elle doucement , Pierre m' a dit de ne pas m' en mêler ; je le connais , nous allons tout gâter . Faites ce que vous voudrez , monsieur l' officier , mais éloignez - vous . Si Pierre vous voyait auprès de moi , il vous tuerait . "
En ce moment , Pille - miche se montra hors du portail , appela le postillon reste dans l' écurie , aperçut le capitaine et s' écria en dirigeant son fusil sur lui : " Sainte Anne d' Auray ! le recteur d' Antrain avait bien raison de nous dire que les Bleus signent des pactes avec le diable .
Attends , attends , je m' en vais te faire ressusciter , moi !
- Hé ! j' ai la vie sauve , lui cria Merle en se voyant menacé . Voici le gant de ton chef .
- Oui , voilà bien les esprits , reprit le Chouan . Je ne te la donne pas , moi , la vie , Ave Maria ! "
Il tira . Le coup de feu atteignit à la tête le capitaine , qui tomba . Quand Francine s' approcha de Merle , elle l' entendit prononcer indistinctement ces paroles : " J' aime encore mieux rester avec eux que de revenir sans eux . "
Le Chouan s' élança sur le Bleu pour le dépouiller en disant : " Il y a cela de bon chez ces revenants , qu' ils ressuscitent avec leurs habits . " En voyant dans la main de capitaine qui avait fait le geste de montrer le gant du Gars cette sauvegarde sacrée , il resta stupéfait .
" Je ne voudrais pas être dans la peau du fils de ma mère " , s' écria - t - il . Puis il disparut avec la rapidité d' un oiseau .
Pour comprendre cette rencontre si fatale au capitaine , il est nécessaire de suivre Mlle de Verneuil quand le marquis , en proie au désespoir et à la rage , l' eut quittée en l' abandonnant à Pille - miche .
Francine saisit alors , par un mouvement convulsif , le bras de Marche - à - terre , et réclama , les yeux pleins de larmes , la promesse qu' il lui avait faite . à quelques pas d' eux , Pille - miche entraînait sa victime comme s' il eût tiré après lui quelque fardeau grossier .
Marie , les cheveux épars , la tête penchée , tourna les yeux vers le lac ; mais , retenue par un poignet d' acier , elle fut forcée de suivre lentement le Chouan , qui se retourna plusieurs fois pour la regarder ou pour lui faire hâter sa marche , et chaque fois une pensée joviale dessina sur cette figure un épouvantable sourire .
" Est - elle godaine ! ... " s' écria - t - il avec une grossière emphase .
En entendant ces mots , Francine recouvra la parole .
LES CHOUANS (VIII, milit)
Page:1056