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Mme Birotteau n' était pas inconnue à ce jeune homme , venu chez elle une ou deux fois pour y demander de ces bagatelles souvent aussi importantes que de grandes choses . Le duc expliqua les intentions de La Billardière . En apprenant le malheur qui accablait le filleul de la marquise d' Uxelles , Vandenesse alla sur - le - champ avec La Billardière chez le comte de Fontaine , en priant Mme Birotteau de l' attendre .
M . le comte de Fontaine était , comme La Billardière , un de ces braves gentilshommes de province , héros presque inconnus qui firent la Vendée . Birotteau ne lui était pas étranger , il l' avait vu jadis à La Reine des roses .
Les gens qui avaient répandu leur sang pour la cause royale jouissaient à cette époque de privilèges que le Roi tenait secrets pour ne pas effaroucher les Libéraux . M . de Fontaine , un des favoris de Louis XVIII , passait pour être dans toute sa confidence .
Non seulement le comte promit positivement une place , mais il vint chez le duc de Lenoncourt , alors de service , pour le prier de lui obtenir un moment d' audience dans la soirée , et de demander pour La Billardière une audience de MONSIEUR , qui aimait particulièrement cet ancien diplomate vendéen .
Le soir même , M . le comte de Fontaine alla des Tuileries chez Mme Birotteau lui annoncer que son mari serait , après son concordat , officiellement nommé à une place de deux mille cinq cents francs à la Caisse d' amortissement , tous les services de la Maison du Roi se trouvant alors chargés de nobles surnuméraires avec lesquels on avait pris des engagements .
Ce succès n' était qu' une partie de la tâche de Mme Birotteau . La pauvre femme alla rue Saint - Denis , au Chat - qui - pelote , trouver Joseph Lebas . Pendant cette course , elle rencontra dans un brillant équipage Mme Roguin , qui sans doute faisait des emplettes .
Ses yeux et ceux de la belle notaresse se croisèrent . La honte que la femme heureuse ne put réprimer en voyant la femme ruinée donna du courage à Constance .
" Jamais je ne roulerai carrosse avec le bien d' autrui " , se dit - elle .
Bien reçue de Joseph Lebas , elle le pria de procurer à sa fille une place dans une maison de commerce respectable . Lebas ne promit rien ; mais huit jours après Césarine eut la table , le logement et mille écus dans la plus riche maison de nouveautés de Paris , qui fondait un nouvel établissement dans le quartier des Italiens .

CESAR BIROTTEAU (VI, paris)
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