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Birotteau aperçut cette sauvage marchande au milieu de sacs de noisettes , de marrons et de noix .
" Bonjour , ma chère dame , dit Birotteau d' un air léger .
- Ta chère , dit - elle . Hé ! mon fils , tu me connais donc pour avoir eu des rapports agréables ? Est - ce que nous avons gardé des rois ensemble ?
- Je suis parfumeur et de plus adjoint au maire du deuxième arrondissement de Paris ; ainsi , comme magistrat et consommateur , j' ai droit à ce que vous preniez un autre ton avec moi .
- Je me marie quand je veux , dit la virago , je ne consomme rien à la mairie et ne fatigue pas les adjoints . Quant à ma pratique , a m' adore , et je leux parle à mon idée . S' ils ne sont pas contents , ils vont se faire enfiler alieurs .
- Voilà les effets du monopole ! se dit Birotteau .
- Popole ! c' est mon filleul : il aura fait des sottises ; venez - vous pour lui , mon respectable magistrat ? dit - elle en adoucissant sa voix .
- Non , j' ai eu l' honneur de vous dire que je venais en qualité de consommateur .
- Eh bien ! comment te nommes - tu , mon gars ? Je t' ai pas core vu venir .
- Avec ce ton - là , vous devez vendre vos noisettes à bon marché ? dit Birotteau qui se nomma et donna ses qualités .
- Ah ! vous êtes le fameux Birotteau qu' a une belle femme ! Et combien en voulez - vous de ces sucrées de noisettes , mon cher amour ?
- Six mille pesant .
- C' est tout ce que j' en ai , dit la marchande en parlant comme une flûte enrouée . Mon cher monsieur , vous n' êtes pas dans les fainéants pour marier les filles et les parfumer ! Que Dieu vous bénisse , vous avez de l' occupation .
Excusez du peu ! Vous allez être une fière pratique , et vous serez inscrit dans le coeur de la femme que j' aime le mieux au monde ...
- Qui donc ? ...
- Hé bien ! la chère Mme Madou .
- Combien vos noisettes ?
- Pour vous , mon bourgeois , vingt - cinq francs le cent , si vous prenez le tout .

CESAR BIROTTEAU (VI, paris)
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