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Appuyé sur un arbre du boulevard pour feuilleter le livre , il lut une note où l' auteur expliquait la nature du derme et de l' épiderme et démontrait que telle pâte ou tel savon produisait un effet souvent contraire à celui qu' on en attendait , si la pâte et le savon donnaient du ton à la peau qui voulait être relâchée , ou relâchaient la peau qui exigeait des toniques .
Birotteau acheta ce livre où il vit une fortune . Néanmoins , peu confiant dans ses lumières , il alla chez un chimiste célèbre , Vauquelin , auquel il demanda tout naïvement les moyens de composer un double cosmétique qui produisît des effets appropriés aux diverses natures de l' épiderme humain .
Les vrais savants , ces hommes si réellement grands en ce sens qu' ils n' obtiennent jamais de leur vivant le renom par lequel leurs immenses travaux inconnus devraient être payés , sont presque tous serviables et sourient aux pauvres d' esprit .
Vauquelin protégea donc le parfumeur , lui permit de se dire l' inventeur d' une pâte pour blanchir les mains et dont il lui indiqua la composition .
Birotteau appela ce cosmétique la Double Pâte des sultanes .
Afin de compléter l' oeuvre , il appliqua le procédé de la pâte pour les mains à une eau pour le teint qu' il nomma l' Eau carminative . Il imita dans sa partie le système du Petit Matelot , il déploya , le premier d' entre les parfumeurs , ce luxe d' affiches , d' annonces et de moyens de publication que l' on nomme peut - être injustement charlatanisme .
La Pâte des sultanes et l' Eau carminative se produisirent dans l' univers galant et commercial par des affiches colorées , en tête desquelles étaient ces mots : Approuvées par l' Institut ! Cette formule , employée pour la première fois , eut un effet magique .
Non seulement la France , mais le continent fut pavoisé d' affiches jaunes , rouges , bleues , par le souverain de La Reine des roses qui tenait , fournissait et fabriquait , à des prix modérés , tout ce qui concernait sa partie .

CESAR BIROTTEAU (VI, paris)
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