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Une femme comme Mme Schontz , qui jouait à la grande dame , et dont la valeur réelle était supérieure , devait être et fut un sujet d' orgueil pour Fabien qui s' éprit d' elle au point de ne jamais se présenter qu' en toilette , bottes vernies , gants paille , chemise brodée et à jabot , gilets de plus en plus variés , enfin avec tous les symptômes extérieures d' un culte profond .
Un mois avant la conférence de la duchesse et de son directeur , Mme Schontz avait confié le secret de sa naissance et de son vrai nom à Fabien , qui ne comprit pas le but de cette confidence .
Quinze jours après , Mme Schontz , étonnée du défaut d' intelligence du Normand , s' écria : " Mon Dieu ! suis - je niaise ? il se croit aimé pour lui - même .
" Et alors elle emmena l' Héritier dans sa calèche , au Bois , car elle avait depuis un an petite calèche et petite voiture basse à deux chevaux . Dans ce tête - à - tête public , elle traita la question de sa destinée et déclara vouloir se marier .
" J' ai sept cent mille francs , dit - elle , je vous avoue que , si je rencontrais un homme plein d' ambition et qui sût comprendre mon caractère , je changerais de position , car savez - vous quel est mon rêve ? Je voudrais être une bonne bourgeoise , entrer dans une famille honnête , et rendre mon mari , mes enfants tous bien heureux ! " Le Normand voulait bien être distingué par Mme Schontz ; mais l' épouser , cette folie parut discutable à un garçon de trente - huit ans que la révolution de Juillet avait fait juge .
En voyant cette hésitation , Mme Schontz prit l' Héritier pour cible de ses traits d' esprit , de ses plaisanteries , de son dédain , et se tourna vers Couture .
En huit jours , le spéculateur , à qui elle fit flairer sa caisse , offrit sa main , son coeur et son avenir , trois choses de la même valeur .
Les manèges de Mme Schontz en étaient là , lorsque Mme de Grandlieu s' enquit de la vie et des moeurs de la Béatrix de la rue Saint - Georges .
D' après le conseil de l' abbé Brossette , la duchesse pria le marquis d' Ajuda de lui amener le roi des coupe - jarrets politiques , le célèbre comte Maxime de Trailles , l' Archiduc de la bohème , le plus jeune des jeunes gens , quoiqu' il eût cinquante ans .
M . d' Ajuda s' arrangea pour dîner avec Maxime au club de la rue de Beaune , et lui proposa d' aller faire un mort chez le duc de Grandlieu qui , pris par la goutte avant le dîner , se trouvait seul .

BEATRIX (II, privé)
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