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Les trois premières lettres de Sabine à sa mère accuseront une situation qui , malheureusement , ne sera pas neuve pour quelques jeunes mariées et pour beaucoup de vieilles femmes . Toutes celles qui se sont trouvées pour ainsi dire gardes - malades d' un coeur ne s' en sont pas , comme Sabine , aperçues aussitôt . Mais les jeunes filles du faubourg Saint - Germain , quand elles sont spirituelles , sont déjà femmes par la tête .
Avant le mariage , elles ont reçu du monde et de leur mère le baptême des bonnes manières . Les duchesses jalouses de léguer leurs traditions ignorent souvent la portée de leurs leçons quand elles disent à leurs filles : " Tel mouvement ne se fait pas .
Ne riez pas de ceci . On ne se jette jamais sur un divan , l' on s' y pose .
Quittez ces détestables façons ! Mais cela ne se fait pas , ma chère ! " etc . Aussi de bourgeois critiques ont - ils injustement refusé de l' innocence et des vertus à des jeunes filles qui sont uniquement , comme Sabine , des vierges perfectionnées par l' esprit , par l' habitude des grands airs , par le bon goût , et qui , dès l' âge de seize ans , savaient se servir de leurs jumelles .
Sabine , pour s' être prêtée aux combinaisons inventées par Mlle des Touches pour la marier , devait être de l' école de Mlle de Chaulieu .
Cette finesse innée , ces dons de race rendront peut - être cette jeune femme aussi intéressante que l' héroïne des Mémoires de deux jeunes mariées , lorsqu' on verra l' inutilité de ces avantages sociaux dans les grandes crises de la vie conjugale , où souvent ils sont annulés sous le double poids du malheur et de la passion .
I . à MADAME LA DUCHESSE DE GRANDLIEU
Guérande , avril 1838 .
" Chère mère , vous saurez bien comprendre pourquoi je n' ai pu vous écrire en voyage , notre esprit est alors comme les roues . Me voici , depuis deux jours , au fond de la Bretagne , à l' hôtel du Guénic , une maison brodée comme une boîte en coco .
Malgré les attentions affectueuses de la famille de Calyste , j' éprouve un vif besoin de m' envoler vers vous , de vous dire une foule de ces choses qui , je le sens , ne se confient qu' à une mère .

BEATRIX (II, privé)
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